Le synode, un défi aussi pour ma paroisse !
Enfin, serait-on presque tenté de dire. Annoncé en mars 2020 par le pape François, le synode pour une Église synodale se tient ce mois-ci à Rome. Autour du Pape, environ 360 personnes – dont 54 femmes avec droit de vote, une première dans l’histoire de l’Église – travaillent et réfléchissent ensemble pour aboutir à un document unique. Cela ne marquera toutefois pas la fin du processus synodal, puisqu’une seconde assemblée est appelée à se réunir à Rome en octobre 2024, qui sera elle-même probablement suivie d’une exhortation du Pape puis du temps de réception dans les communautés catholiques du monde entier.
Si le temps a été si long entre l’annonce et cette première assemblée synodale, c’est que le pape François a véritablement voulu que les catholiques – et pas seulement – du monde entier puissent prendre part à ce long processus. Plus qu’une réunion d’évêques et de cardinaux, le Pape a demandé à ce que puisse contribuer à ce synode toute personne de bonne volonté. Ainsi en France, pas moins de 15 0000 personnes ont participé aux travaux de réflexion, menés entre l’automne 2021 et le printemps 2022. En Belgique, entre 2 000 et 4 000 personnes ont contribué dans chacun des diocèses du pays, l’un d’eux sondant pas moins de 10 000 jeunes ! Au niveau mondial, cette démarche décidée par le Pape est probablement la plus grande consultation jamais réalisée.
Pour François, ce choix était très important : « Tous doivent participer, c’est un engagement ecclésial indispensable ! Tous les baptisés ! », insistait-il ainsi dans son discours d’ouverture du synode en octobre 2021. « Cela exige de transformer certaines visions verticales, déformées et partielles de l’Église, du ministère presbytéral, du rôle des laïcs, des responsabilités ecclésiales, des rôles de gouvernement, et ainsi de suite », reconnaissait-il d’emblée.
Communion missionnaire
Fort de cette expérience synodale, des idées ont déjà été lancées, sans attendre les étapes suivantes de ce processus long de plusieurs années. « Des manières de travailler en Église sont en train d’évoluer », confirme Marie-Pierre Cockenpot, chargée de mission auprès de l’évêque d’Arras (Pas-de-Calais) pour la mise en œuvre de la synodalité. Dans son diocèse par exemple, tous les agents pastoraux ont été réunis pour deux jours de formation. « Nous avons expérimenté une méthode de discernements ensemble, prêtres, diacre et laïcs », se réjouit la chargée de mission. Cette dernière travaille désormais avec les équipes d’animations pastorales des paroisses pour poursuivre ces réflexions afin « d’entrer dans une manière synodale de vivre l’Église ».
Dans le diocèse de Versailles (Yvelines), l’évêque Mgr Luc Crepy a lui aussi pris les devants, sans attendre les conclusions romaines et a d’ores et déjà créé un conseil diocésain de pastorale, lancé le mois dernier. L’objectif, expliquait-il dans une lettre adressée aux participants à la consultation synodale, est de « réfléchir aux enjeux et aux défis de l’Évangélisation dans notre diocèse ». Voulant selon ses statuts être « l’expression du Peuple de Dieu dans sa diversité », ce conseil constitué de 24 personnes mêle prêtres et laïcs, hommes et femmes. « C’est un lieu d’exercice de la synodalité au service de la communion, au sein de l’Église locale et de l’Église universelle », ambitionne Mgr Crepy.
Dans une démarche similaire, l’évêque d’Angers (Anjou), Mgr Emmanuel Delmas, a décidé de reconstituer son conseil pastoral diocésain, qui ne s’était plus réuni pendant plusieurs années.
Outre la création de ce conseil, l’évêque de Versailles annonçait dans sa lettre également que « les membres des conseils pastoraux seront invités à chercher la meilleure manière de vivre localement la dynamique synodale au service d’une communion missionnaire plus forte et plus féconde dans la vie paroissiale ». Cette volonté de travailler à la synodalité au niveau paroissial n’est d’ailleurs pas propre au seul Mgr Crepy puisqu’elle se retrouve dans le document qui sert de base de travail aux participants de l’assemblée romaine actuelle. Sur tous les continents, y a-t-il été affirmé, a été exprimé « avec force le désir que la manière synodale de procéder, expérimentée dans le cheminement actuel, entre dans la vie quotidienne de l’Église à tous les niveaux (…) à commencer par les conseils pastoraux diocésains et paroissiaux ».Pour autant, comme le plaidaient des contributeurs des Yvelines, « il ne s’agit pas toujours d’inventer du neuf, mais de mieux faire vivre les instances paroissiales déjà existantes, de manière plus synodale, plus articulées avec l’ensemble de la paroisse ».
La mission de chacun
Au-delà des questions de structure, la consultation synodale a également mis en avant le besoin des catholiques de « vivre » en paroisse. D’autant que comme l’explique un participant marseillais à la consultation, « il est très difficile de trouver sa place dans la vie communautaire d’un clocher ; on ne veut pas s’imposer et on n’est pas bien accueilli ». Face à cela, les contributeurs parisiens proposent de faire du dimanche « un moment fort de vie communautaire », en créant « des occasions de se rencontrer au-delà de la messe (…) [pour] dépasser les cloisonnements entre les différents groupes de la paroisse, maintenir le lien avec ceux qui se sont préparés aux sacrements, s’adresser au public irrégulier et à ceux qui se tiennent sur le seuil ».
Ces initiatives répondent à la définition d’une Église synodale, donnée par le pape François lui-même : « un lieu ouvert où chacun se sent chez lui et peut participer ». Ainsi, avant même de dépendre de décisions romaines, la synodalité concerne chacun et se vit d’abord en communautés de bases, les paroisses. Avec pour objectif, rapporte Benoît, participant toulousain à la consultation, de « mieux développer la mission de chacun au cœur et à l’extérieur de l’Église : découvrir le Christ, s’y attacher et en témoigner ».