Le testament spirituel de Benoît XVI
À 95 ans, le pontife allemand s’est éteint au matin du dernier jour de l’année 2022. On apprendra quelques heures plus tard que ses dernières paroles furent « Jésus, je t’aime », prononcées vers 3 heures du matin, avant que le 265e pape de l’histoire de l’Église n’entre en agonie. Après l’annonce de son décès, le Saint-Siège a diffusé dans la soirée le testament spirituel du pape Benoît XVI. Dans ce texte rédigé par le pontife le 29 août 2006, l’ancien archevêque de Munich demande « pardon » à toutes les personnes à qui il aurait pu faire du tort. Rendant grâce pour sa famille et ses amis, l’ancien professeur de théologie exhorte les fidèles catholiques à tenir bon dans la foi face aux hypothèses scientifiques qui prétendent la réduire au silence.
Des raisons pour remercier
« Si, à cette heure tardive de ma vie, je jette un regard en arrière sur les décennies que j’ai traversées, je vois tout d’abord combien j’ai de raisons de remercier », écrit celui qui avait alors 79 ans au moment de signer son testament spirituel. Le pape alors régnant – dans la deuxième année de son pontificat – exprime longuement sa gratitude, d’abord à Dieu lui-même, « qui m’a toujours relevé lorsque je commençais à glisser, qui m’a toujours offert la lumière de son visage ».
Joseph Ratzinger exprime sa reconnaissance à ses parents qui lui ont donné la vie « à une époque difficile » et « au prix de grands renoncements ». Il rend hommage à « la foi clairvoyante » de son père qui a été pour lui un « guide » au milieu de ses connaissances scientifiques, et à « la piété chaleureuse et la grande bonté » de sa mère. Il se souvient aussi de sa sœur Maria qui l’a « servi de manière désintéressée et pleine de sollicitude pendant des décennies » et de son frère Georg, décédé en 2020, dont « la clairvoyance » des jugements, la « puissante détermination » et la « sérénité » lui ont « ouvert la voie ».
Benoît XVI remercie Dieu pour ses « nombreux amis, hommes et femmes », ses collaborateurs, ses enseignants, ses élèves et pour sa « belle patrie » bavaroise, appelant ses compatriotes à ne pas se laisser « détourner de la foi ». Avant d’élargir son appel à tous les catholiques : « Tenez bon dans la foi ! Ne vous laissez pas troubler ! »
Science et foi
Le pape allemand consacre alors une partie du texte à un thème qui lui fut cher : le dialogue entre science et foi. Alors que la science peut sembler avoir « des vues irréfutables qui s’opposent à la foi catholique », l’ancien préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi met en garde contre ce qui ne sont parfois que des « interprétations philosophiques appartenant seulement en apparence à la science ». Toutefois, il souligne aussi que la foi peut sentir « la limite de la portée de ses affirmations » et « mieux comprendre ce qu’elle est » grâce au dialogue avec les sciences naturelles.
Le théologien explique qu’il a vu « s’effondrer, au fil des générations, des thèses qui semblaient inébranlables », pointant du doigt le libéralisme, l’existentialisme, et le marxisme. Il constate que, « dans l’enchevêtrement des hypothèses, la raison de la foi a émergé et émerge à nouveau ». « Jésus Christ est vraiment le chemin, la vérité et la vie – et l’Église, dans toutes ses imperfections, est vraiment Son corps », affirme-t-il avec conviction.
Pardon et prières
« À tous ceux à qui j’ai fait du tort d’une manière ou d’une autre, je demande pardon du fond du cœur », écrit aussi Benoît XVI, demandant des prières « afin que le Seigneur [le] laisse entrer dans les demeures éternelles malgré tous [ses] péchés et [ses] insuffisances ».
Les obsèques de Benoît XVI ont été célébrées le 5 janvier place Saint-Pierre par le pape François. Durant les trois jours qui ont précédé les funérailles, des milliers de personnes ont pu se rendre dans la basilique Saint-Pierre pour adresser un hommage au premier pape émérite de l’histoire contemporaine.