Ils sont nés le même jour que Jésus
Qu’ont en commun le Premier ministre canadien Justin Trudeau, l’ex-otage Ingrid Betancourt, l’homme politique Noël Mamère, ou encore le président de la Fédération française de football Noël Le Graët ? Tous sont nés un 25 décembre, comme le révèle d’ailleurs le prénom des deux derniers. « Il y avait une chance sur 365 ! », s’amuse le père Marc Prigent, prêtre du diocèse de Quimper et Léon, qui fête lui aussi son anniversaire le jour de Noël.
« Quand j’étais petite, le 25 décembre était une journée triplement importante : c’était un jour religieux, un jour de fête et aussi mon anniversaire. » Jeune femme de la région parisienne âgée d’une trentaine d’années, Laureline partage également la même date d’anniversaire que celle retenue pour l’Enfant Jésus. « Mes parents ont toujours veillé à ce que l’on puisse bénéficier des choses positives des deux côtés, raconte-t-elle. Ainsi nous avions tous les ans un sapin et une crèche dans laquelle nous placions le petit Jésus le 25 décembre après être revenus de la messe de minuit, toujours très festive. » Mais pas question pour autant de faire disparaître la fête de sa naissance à elle derrière la fête religieuse. « Le repas familial de Noël était à midi, mon anniversaire au goûter : l’un n’a pas pris le pas sur l’autre. »
Un jour de joie
Les souvenirs d’enfance du père Prigent à propos de son anniversaire se situent dans la même lignée que ceux de Laureline. « On me dit souvent que cela devait être difficile lorsque j’étais petit de ne pas avoir de véritable journée d’anniversaire, explique-t-il. En réalité, cela n’a jamais été le cas, mes parents ont toujours distingué les deux en séparant mon anniversaire des festivités de Noël. » Lui aussi né le 25 décembre, le père Christian Renger, du diocèse de Strasbourg, souligne d’ailleurs qu’il y a des dates plus désagréables pour un enfant. « Mon frère est du 19 juin, une date qui correspondait toujours aux examens, en particulier le brevet puis le bac ! Et comme tout le monde connaissait ma date d’anniversaire, les voisins me le souhaitaient. » Par ailleurs, comme le met en avant le père Prigent, s’il est compliqué pour un enfant de célébrer son anniversaire le jour de Noël, il est toujours possible de garder les festivités pour la fête patronale.
À la maternité catholique Sainte-
Félicité, à Paris, Noël est bien sûr également un jour tout particulier, même si, comme le dit la supérieure Sœur Marie-Matthieu, « ici, c’est tous les jours un peu Noël ». La messe est proposée et les sœurs passent dans les chambres chanter des cantiques de Noël et offrent aux jeunes mamans et aux bébés des petits cadeaux qu’elles ont elles-mêmes confectionnés, comme des bavoirs. « Nous offrons aussi un symbole de la crèche, pour rappeler un petit peu le vrai sens de Noël », indique encore Sœur Marie-Matthieu.
« Il y a beaucoup d’émotion, poursuit-
elle, car cette période de fêtes rappelle à tous de belles choses, même à ceux qui ne sont pas croyants. »
Si elle n’est pas née elle-même le 25 décembre, Anne se place dans cet esprit : son premier fils est né à la veille de Noël, la contraignant à rester à la maternité le temps de la fête. « Je me suis dit que c’était la seule raison positive et heureuse d’être à l’hôpital, un endroit où on ne va en général pas de gaité de cœur. Être à l’hôpital ce jour-là pour cette raison, ce n’était pas un problème », poursuit-elle en qualifiant son fils de « plus beau cadeau » de Noël.
« Une grâce »
Être né le jour de la naissance du Christ a-t-il un impact dans la vie des personnes concernées ? Le premier, immédiat, est que beaucoup porte cette réalité dans leur prénom, comme Noël Mamère et Noël Le Gret. « Je ne me serais pas appelé Christian si je n’étais pas né le 25 décembre », assure le père Renger. Avec son mari, Anne a choisi « Emmanuel » comme second prénom pour son fils. « Quand on a vu qu’il allait naître au moment de Noël, nous avons voulu le placer sous ce patronage », se souvient-elle. À en croire Sœur Marie-Matthieu, il s’agit toutefois d’une pratique en perte de vitesse.
Avoir la même date d’anniversaire que le Christ peut marquer plus profondément. « Quand j’étais petite, mes parents insistaient beaucoup sur le fait que c’était exceptionnel d’être née le jour de Noël, que c’était un signe, un symbole, se remémore Laureline. Je ne sais pas très bien ce que cela veut dire, mais j’y pense souvent. » Pour elle, la date est encore un peu plus particulière, depuis qu’elle a perdu son grand-père un 25 décembre, il y a quelques années. « Depuis, j’ai une spiritualité bien plus forte ce jour-là que le reste de l’année. »
« Lorsque les gens apprennent ma date de naissance, ils me disent que j’étais prédestiné à être prêtre », sourit de son côté le père Prigent. S’il s’amuse de sa réflexion, il ne lui donne pas forcément beaucoup de crédit. « Cela n’a certainement pas été déterminant pour ma vocation, mais peut-être qu’inconsciemment, j’ai eu une sorte d’identification au Christ. » Lui voit plutôt cela comme « une grâce que le Seigneur m’ait donné de naître le jour de cette fête liturgique ». De son côté, le père Renger affirme lui aussi que sa vocation sacerdotale n’est pas liée à sa date d’anniversaire, même si « cela n’y a certainement pas été totalement indifférent, tant Noël est un jour important dans notre foi : comme sur la Croix, Dieu se révèle dans la crèche avec toute la fragilité et l’impuissance possible ». En ne plaisantant qu’à moitié, le père Prigent voit une aide dans sa foi d’être né le 25 décembre : « C’est une grâce car au moins sur ce point-là je ressemble à Jésus, c’est un premier pas vers la configuration au Christ ! »