Redonner du sens à la vie
Toujours souriant et prévenant, Philippe Vanderhaegen est un distributeur de joie. Une joie qu’il tire d’abord de sa foi, toute jeune. Car si ce banquier de 58 ans a été responsable avec sa femme, Françoise, de groupes scouts, il n’a fait sa confirmation qu’en 2011, « un peu pour me mettre en conformité car j’avais un problème de cohérence », se souvient-il. Et puis, il y a quatre ans, alors qu’ils participent au chemin de croix du diocèse de Bordeaux dans les rues de la ville, on leur propose d’accompagner une fois par mois des personnes en situation de handicap lors de sorties avec les compagnons Simon de Cyrène.
« On a dit oui parce que donner quatre heures de temps par mois, ce n’était pas insurmontable. Mais en vérité le handicap me faisait peur. Quand on voit des jeunes, ou moins jeunes, qui ne s’expriment pas, qui sont en fauteuil, qui ont du mal à manger, sincèrement, il y a tendance à tourner le regard. Et puis, on se rend compte qu’il y a énormément de joie. Ils ne sont pas du tout dans l’acrimonie, mais dans la bienveillance. Loin de se plaindre, ils sont dans l’espérance. L’espérance que nous, chrétiens, n’avons pas forcément ! »
Les moments passés avec les compagnons Simon de Cyrène sont aux antipodes de son milieu professionnel mais rejoignent la phrase qui anime Philippe, « Tu as du prix à mes yeux et je t’aime ». « Aujourd’hui, on ne juge que par la performance. Avec les personnes en situation de handicap, on ne cherche pas la performance mais la beauté, le talent qu’il y a en chaque personne. Nous en avons tous, et encore plus les personnes en situation de handicap. Ils sont d’une richesse et d’une profondeur qui me font grandir. »
Après deux ans de compagnonnage, Philippe accepte de devenir président de l’association Césarée, le groupe des compagnons Simon de Cyrène bordelais, pour accompagner son développement. « Le but des compagnons est d’apprendre à se connaître, à vivre ensemble, avant de leur permettre de vivre dans un habitat partagé pour les sortir de la solitude engendrée par le handicap. Le groupe devenait conséquent, avec une cinquantaine de compagnons, et la providence aidant, un projet immobilier permettait la création de 2 ou 3 maisons partagées d’ici 2022. Aujourd’hui c’est même 4 ou 5 maisons qui devraient ouvrir grâce à un second projet immobilier. »
La providence faisant bien les choses, l’association vient même de lancer un Groupe d’entraide mutuelle (GEM) en janvier. « Habituellement on ouvre les maisons puis on crée un GEM pour que les habitants aient des activités la journée. Là nous avions un financement de l’Agence régionale de santé (ARS) pour ouvrir un GEM. Normalement, il faut trois ans pour qu’un dossier soit accepté, ça n’a pris que trois mois ! Nous proposons dans un premier temps des repas, des sorties, puis au fur et à mesure du théâtre, du dessin, du chant… »
Si l’association est ouverte à tous, croyants et non-croyants, Philippe vit son engagement comme une véritable mission. Et sa position de jeune converti est pour lui un atout, « ça me permet de mieux comprendre ceux qui sont à la périphérie car je l’ai moi aussi été. »