Les 40 ans du Renouveau

Né en 1967 sur un campus américain, le mouvement charismatique est longtemps resté suspect dans l’Eglise catholique. Malgré Vatican II, malgré tout ce qui a été écrit de l’importance nouvelle des laïcs, ces groupes de prière et ces communautés – le plus souvent fondées par de jeunes fidèles – sont tenus à distance par les églises locales. L’heure est alors à l’action sociale, à l’enfouissement dans le monde et à un certain syncrétisme théologique plutôt qu’au spirituel, à la proclamation d’une foi radicale et à la mission. Pourtant Paul VI ne s’y trompe pas. Dix ans ne se sont pas écoulés depuis que les étudiants catholiques de l’université Duquesne à Pittsburgh en Pennsylvanie ont reçu le “baptême de l’esprit”, que le Pape reçoit à Rome dix mille membres du “renouveau charismatique”. Il reconnaît en eux l’un des signes du “Printemps de l’Eglise” annoncé par Pie XII et de cette « nouvelle Pentecôte d’amour » prophétisée par Jean XXIII. Mais Paul VI est critiqué de tous bords, et l’institution se méfie de ces “dévisseurs d’ampoules”* qui prétendent parler en langues ou exercer un ministère de guérison.
Le mouvement, pourtant, gagne de l’ampleur. En France, les sessions de Paray-le-Monial, de Tigery, de Lisieux, ou de Lourdes font recette et les communautés nouvelles recrutent à tour de bras des hommes et des femmes aux parcours les plus inattendus.
L’appui sans faille de Jean-Paul II, son appel à une « nouvelle évangélisation », les grands rassemblements de jeunes qu’il inaugure, l’évidence des fruits spirituels portés par les nouvelles communautés, le renouvellement que les “charismatiques” commencent à apporter dans les paroisses, vont avoir raison des méfiances et des peurs.
Aujourd’hui, soixante-dix millions de catholiques dans deux cents pays ont profité d’une manière ou d’une autre des grâces du Renouveau. En 1998, Jean-Paul II s’adressant à leurs représentants réunis à Rome dressait ce bilan : « Les nouvelles communautés, donnent incontestablement un élan nouveau à la vie consacrée comme à la mission pastorale dans les diocèses. Elles ont une audace qui manque parfois aux instituts qui existent depuis plus longue date. Elles contribuent à renouveler la vie communautaire, la vie liturgique, et l’engagement dans l’évangélisation dans de nombreux domaines. Une telle situation est sans doute comparable à ce qu’ont dû connaître saint Dominique et saint François. »
Pour autant, tout est-il bleu ciel sur fond rose ? Certains charismatiques craignent qu’en s’institutionnalisant le mouvement perde de son caractère prophétique et souhaitent que les communautés ou les groupes de prières se recentrent sur les “charismes”, tels qu’ils étaient vécus dans les premières communautés chrétiennes. D’autres font remarquer que dans la première lettre aux Corinthiens Saint Paul décrit les charismes avec la mention : « A utiliser avec prudence et discernement ». Il est donc possible que les communautés charismatiques évoluent à l’avenir dans des directions plus complémentaires qu’opposées : les unes plus actives au sein de l’institution, les autres plus “prophétiques”. Il se peut aussi que le Saint-Esprit suscite encore des formes de vie ecclésiale inédites.
En revanche deux réalités sont incontournables : le Renouveau n’est pas toute l’Eglise et le terme de renouveau ne doit pas nous tromper. Quantitativement l’Eglise diocésaine et paroissiale change de visage et se dirige vers une situation de faiblesse inconnue en France depuis 1 500 ans. Les nouvelles communautés y auront donc une position relative plus importante. Mais, ce renouveau est lui-même très relatif : au XIXe siècle, quatre cents congrégations ont été fondées en France ! Or depuis 1967 bien moins de quarante communautés nouvelles ont vu le jour chez nous.
Nous entrons dans une époque où l’Eglise, humainement affaiblie, devra se concentrer sur l’essentiel et les fidèles s’investir d’avantage dans la mission. N’est-ce pas pour cette raison que le Saint-Esprit a suscité les communautés nouvelles ?

*Expression péjorative, inspirée par l’attitude des charismatiques dans la prière, les bras levés.

« Des rayons de soleil »
« Je souhaite de tout cœur que le Renouveau dans l’Esprit-Saint suscite toujours davantage dans l’Eglise la conversion intérieure sans laquelle l’homme peut difficilement résister aux séductions de la chair et aux concupiscences du monde. Notre époque a grandement besoin d’hommes et de femmes qui, tels des rayons de soleil, sachent communiquer la fascination de l’Evangile et la beauté de la vie nouvelle dans l’Esprit.
A travers la force irrésistible de la prière de louange et la grâce qui jaillit de la vie sacramentelle, l’Esprit offre sans cesse ses charismes à la communauté ecclésiale, afin qu’elle soit constamment embellie et édifiée. »
Jean-Paul II

INFOS
3 et 4 juin à Rome, vigiles et Messe avec
Benoît XVI pour le 40e anniversaire du Renouveau charismatique catholique mondial !