Maladie d'Alzheimer,la famille joue un rôle indispensable

25 Octobre 2004 | par

Au commencement, Monique, 72 ans, perdait ses clés ou bien cherchait souvent ses lunettes... comme tout le monde. Puis, un jour elle n'arriva plus à faire ses comptes, elle se perdit plusieurs fois en allant faire ses courses au marché. Une autre fois, oubliant que son mari était décédé, elle s'étonna de ne pas le voir dans son garage où il bricolait autrefois. Au début, les oublis qui frappent les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ressemblent à ceux que chacun éprouve à tout âge, mais ils évoluent peu à peu vers des troubles plus importants, transformant sensiblement la personnalité des malades. Et malheureusement, la progression des symptômes est pour le moment irréversible.

Consulter sans attendre

Dès que des oublis se manifestent régulièrement, les personnes touchées doivent consulter sans attendre. La plupart des médecins généralistes étant mal formés au diagnostic de cette maladie, il est préférable de prendre rendez-vous dans une consultation pour la mémoire. De telles consultations existent au sein des services de neurologie des hôpitaux, dans toutes les grandes villes. N'attendez pas pour prendre rendez-vous si un parent vous semble en difficulté : les délais d'attente sont longs, il faut parfois compter six mois ! A l'aide de tests de mémoire fiables, un neurologue posera un premier diagnostic qu'il confirmera par une seconde série d'examens quelques mois plus tard, pour s'assurer que les symptômes détectés ne correspondent pas à une autre maladie, curable, celle-là. En effet, une dépression ou une maladie cardiovasculaire se manifeste parfois par les mêmes symptômes. Le diagnostic définitif devra être confirmé par un bilan sanguin et un scanner cérébral.

Souvent, les personnes atteintes minimisent leurs oublis ou les mettent sur le compte de l'âge et ne veulent pas consulter car elles redoutent justement le mauvais diagnostic. Il faut savoir insister en douceur : cela permettra au malade et à sa famille de s'organiser. Selon les psychologues, l'une des meilleures tactiques consiste à s'associer à la détresse du malade en s'impliquant personnellement. Conjoint ou enfants peuvent, par exemple, en émettant des doutes sur leur propre mémoire, manifester le désir de la faire évaluer, ce qui peut être réalisé au cours d'une démarche commune avec la personne malade. A l'heure actuelle, le diagnostic d'Alzheimer est posé avec retard dans environ 40 % des cas, ce qui entraîne une perte de chance pour les patients.

Trop peu d'accueils de jour

En effet, même s'il n'existe aucun traitement curatif de la maladie, quand le diagnostic est posé précocement, on peut retarder l'évolution des symptômes pendant un à deux ans par la prise de médicaments, parfois associés pour être plus efficaces. Il reste que la maladie évolue inexorablement et que l'entourage du malade doit prendre des mesures évolutives pour encadrer au mieux celui-ci. Au début, les troubles restant discrets, le malade peut demeurer chez lui, surtout s'il bénéficie du soutien de son conjoint ou qu'un membre de sa famille ou une aide-ménagère lui rend visite régulièrement, afin de vérifier qu'il ne se met pas en danger. Si le malade habite à proximité d'un accueil de jour spécialisé, on ne saurait trop recommander de l'y inscrire : c'est le meilleur moyen pour qu'il continue, autant qu'il le peut, à avoir une vie sociale en dehors de ses proches et de leur regard douloureux sur lui. Il est accueilli par des gens formés et peut s'adonner à des activités conçues pour lui.

S'accorder le droit de souffler

Cela permet à son entourage de souffler pendant quelques heures chaque jour. Car prendre en charge un malade Alzheimer est éprouvant, tant sur le plan émotionnel que physique. Au fur et à mesure que le malade se dégrade, qu'il change d'humeur, devienne agressif ou soit replié sur lui-même, il arrive un moment où les proches ont du mal à reconnaître en lui le conjoint, le père ou la mère qu'ils ont connu et aimé.

Il faut un caractère bien trempé pour accepter cette déchéance sans s'effondrer et continuer à entourer le malade avec bienveillance et amour. De plus, s'occuper d'un tel malade exige beaucoup de temps des proches, conjoint ou enfants : ceux-ci y consacrent souvent plus de six heures par jour ! Un sacrifice d'autant plus lourd pour les enfants qui, contrairement aux conjoints, sont souvent encore en activité professionnelle et n'habitent pas sur place. De ce fait, plus d'un enfant sur deux, dans ce cas, doit réaménager son emploi du temps.

Une chaîne de solidarité

Au fur et à mesure que les symptômes de la maladie s'alourdissent, s'occuper du malade devient de plus en plus difficile. Pour le faire sans s'épuiser, il ne faut surtout pas prendre un malade en charge tout seul, mais au contraire organiser une véritable chaîne de solidarité autour de lui, comprenant des membres de la famille bénévoles. Attention : il ne faut jamais forcer quiconque à s'occuper d'un tel malade s'il ne s'en sent pas la force ou si cela lui fait peur. Le résultat serait catastrophique et ce serait un mauvais service à lui rendre, ainsi qu'au malade lui-même qui le ressentirait, même s'il ne l'exprime pas.

Dans cette chaîne de solidarité, il faut également inclure une aide-ménagère et des bénévoles extérieurs à la famille. Pour cela, on a intérêt à se rapprocher d'une association locale dépendant de l'union nationale des associations France-Alzheimer qui forme des accompagnants et peut donner des conseils utiles en la matière (voir encadré).

Comment les malades se voient eux-mêmes

On a longtemps cru que les malades n'avaient pas conscience de leurs troubles puisqu'ils n'en parlent jamais. Mais ceux qui les côtoient tous les jours savent au contraire qu'ils se rendent compte très vite de ce qui leur arrive : ils constatent dès le début leurs troubles de mémoire, ils se voient diminuer dans leurs activités quotidiennes, se sentent dévalorisés et, bien sûr, ils en souffrent. D'ailleurs, ils sont nombreux à être dépressifs, sans doute à cause de cette prise de conscience.

Cet état peut les amener à se replier complètement sur eux-mêmes, ce qui les précipite vers une régression encore plus importante. Il faut éviter de les laisser s'enfermer ainsi : ils ont besoin au contraire d'être écoutés et stimulés par un entourage bienveillant. Comme dit le conjoint d'une femme frappée par la maladie : Elle ne me parle presque plus, mais je connais son regard et je comprends ce que j'y lis. C'est pourquoi je ne peux pas la lâcher.                             

 Où s'informer et se faire aider ?

En France, l'union nationale des associations France-Alzheimer comprend une centaine d'associations locales réparties sur toute la France. Ces associations apportent une aide et un soutien aux familles, les renseignent sur leurs droits sociaux, sur les aides à domicile, sur les structures d'accueil et organisent des groupes de parole, des rencontres, etc.

France Alzheimer : 21 Bd, Montmartre

75002 Paris.

Tél : +33-(0)1-42 97 52 41.

Site Internet : www.francealzheimer.org

L'association nationale dirige vers l'association locale la plus proche du domicile du malade.

De nouvelles mesures ministérielles

A l'occasion de la journée mondiale consacrée à la maladie d'Alzheimer, le 21 septembre dernier, le ministre français de la Santé a annoncé plusieurs mesures pour améliorer la qualité de vie des malades et de leurs proches. Parmi celles-ci, les plus attendues sont les suivantes :

la maladie est reconnue comme affection de longue durée (ALD). A ce titre, les traitements sont désormais remboursés à 100 % par la Sécurité sociale ;
de nouvelles consultations mémoire vont être créées et les moyens de celles qui existent déjà vont être renforcés, ce qui permettra de prendre plus rapidement en charge les malades venant consulter ;
 Les accueils de jour des malades vont être développés avec l'objectif de les faire passer de quelque 3000 en 2004 à 15000 en 2007 ;
4500 places d'hébergement en institutions spécialisées ou dans des établissements aménagés seront créées dans les trois ans à venir.
 Quelques chiffres pour mémoire

780000 personnes sont atteintes en France, soit 30 % de plus qu'il y a dix ans, mais deux fois moins que dans vingt ans.
25 % des plus de 80 ans sont touchés par la maladie.
Seulement 10 % des malades bénéficient de soins adaptés en France, d'où l'intérêt qu'ils consultent dès les premiers symptômes pour avoir une chance de traitement, même si celui-ci n'est pas curatif.

Updated on 06 Octobre 2016