Francesco, le frère des malades
Depuis plus de vingt ans, il accompagne ses confrères malades vers la guérison ou jusqu’à la mort. Depuis l’infirmerie du couvent antonien dont il est le responsable, le frère Francesco Stocco évoque les satisfactions et les curiosités d’un « métier » fatiguant mais édifiant.
Le frère Francesco Stocco, 73 ans, arrive au couvent Saint-Antoine en 1986 mais ne se voit confier aucune tâche particulière dans la basilique même. Il s’y rend afin de prier pour les fidèles et pour demander la santé de la « petite troupe » qui lui a été confiée par ses supérieurs, à savoir ses confrères qui, malades ou âgés, ont besoin de soins particuliers.
Tout commence à la fin des années 1960 au lac de Garda, où le frère Francesco est concierge au séminaire franciscain. Le frère Bernardino Rizzi, un compositeur génial fatigué par l’infirmité appartient aussi à cette communauté. Les supérieurs l’ont confié au frère Francesco qui s’applique à son devoir avec amour et dévouement. Le frère provincial,
Vitale Bommarco, qui vient souvent rendre visite au père Bernardino, est frappé par le zèle du frère Stocco et l’invite à s’établir à Trévise, au couvent Saint-François, où des frères malades ont besoin d’assistance. Le frère Francesco répond à l’invitation et, une fois à Trévise, il fréquente un cours à l’hôpital pour devenir infirmier.
Ce sera donc ce parcours qui, en 1986, le conduira à la basilique Saint-Antoine de Padoue : une communauté nombreuse avec plusieurs religieux âgés. Ainsi, lorsque quelqu’un tombe malade, le premier à en être informé est le frère Francesco qui se met immédiatement à l’œuvre. Il contacte les médecins, accompagne ses confrères aux visites, procure les médicaments, collabore aux thérapies et, enfin, en cas d’hospitalisation, il gère les contacts entre les médecins et la famille du malade.
La présence du frère Francesco à l’hôpital de Padoue devient vite familière. Les médecins et le personnel de santé apprennent à le connaître et à l’estimer. En l’apercevant dans les couloirs, nombreux sont ceux qui l’arrêtent, pour le saluer, s’informer sur les conditions de ses malades, chuchoter une demande à porter en leur nom au tombeau de saint Antoine. Les médecins sont toujours aimables et disponibles, assure le frère Francesco. « Ils ne le font pas pour moi – dit-il – mais parce qu’ils voient dans chaque frère malade un confrère de saint Antoine. Et il Santo, comme on l’appelle ici, compte bien pour quelque chose à Padoue ! »
Mille histoires de foi et de courage
Le frère Francesco garde dans son cœur un millier d’aventures pleines de foi et de courage. Ces événements forment la plus humaine mais la moins racontée des histoires : le récit de la façon dont on fait face aux difficultés de la maladie et de la vieillesse et de la façon dont, conforté par la foi, on prend congé de la vie. Les frères se souviennent toujours de l’exemple de saint Antoine qui a fermé les yeux sur la vie après les avoir ouverts sur un horizon de lumière où Jésus est apparu : « Je vois mon Seigneur », ont été ses derniers mots.
À des degrés différents, plus d’un religieux a vécu un moment similaire. Le frère Francesco qui a parfois été le témoin de ce genre de circonstance, se souvient de la mort du père Odorico Comisso, l’un des premiers frères qu’il a assisté. « Les yeux fixés sur un point, il paraissait absorbé par une vision céleste. Je ne peux pas en être sûr – explique-t-il – mais quelque chose d’inhabituel s’était passé en cet instant. » On trouve un exemple semblable dans la mort du frère Gabriele Floriani, l’un des confesseurs de la basilique. Hospitalisé, il fit face à la phase terminale de la maladie « en édifiant tout le monde par sa sérénité franciscaine », indique son nécrologe. Quand le frère Francesco revient dans la chambre du père Gabriele après l’avoir vu expirer sereinement, il trouve l’infirmière, agenouillée à côté du lit, qui lui dit : « Un saint est mort ». « J’étais ému aux larmes », se souvient le père Francesco.
Le souvenir de Mgr Raffaele Radossi, frère conventuel et archevêque de Spolète que le père Francesco a assisté durant ses premières années en tant qu’infirmier, est encore très présent. Avant de prendre congé du monde, dans un moment de lucidité, Mgr Radossi exprima avec un clair « merci » sa reconnaissance envers le père Francesco qui est heureux de raconter.
Il évoque des frères éprouvés par de terribles maladies, qui sont retournés sereinement dans les bras du Père. Le père Giacomo Panteghini par exemple, qui a été durant 20 ans directeur du Messager, et que le frère Stocco a assisté avec diligence et affection jusqu’à son dernier souffle. Et cela comme tant d’autres frères, décrits au moment de leur plus grande faiblesse physique mais aussi de leur plus grande force humaine et spirituelle.