Jésus de Nazareth
Le 24 mai paraissais, dans sa version française, Le premier livre de Benoît XVI, Jésus de Nazareth, Présenté au Vatican le 16 avril dernier. Œuvre de théologien, ce livre est aussi celui d’un pape qui livre son témoignage de foi sur le « vrai Jésus » de l’histoire.
C’est après un long chemin intérieur que je suis arrivé au livre dont nous présentons maintenant au Public la première partie. Les noms en couverture peuvent prêter à confusion : alors que l’auteur signe d’abord Joseph Ratzinger, et seulement après Benoît XVI, les éditeurs, Rizzoli pour L’original en italien et Flammarion pour la version française, ont placé le premier en petits caractères et le second en grands, ce qui assure le succès commercial de l’ouvrage mais fausse
Son inspiration profonde
Car, dit l’auteur dans la préface, « ce livre n’est absolument pas un acte relevant de mon magistère, mais seulement une expression de ma recherche personnelle ». Le Pape, ancien responsable de la doctrine de la foi, évêque, professeur, prêtre, veut donc s’effacer devant le simple croyant Joseph Ratzinger, qui transmet le fruit de sa longue et intime fréquentation du visage du Seigneur. Mais, personne ne l’ignore, ce croyant est aussi le successeur de pierre et à ce titre il livre, non pas une nouvelle vision personnelle de Jésus, parmi tant d’autres, mais le fruit de trente années d’enseignement et de foi : le vrai visage du Jésus tel qu’il ressort d’une recherche scientifique rigoureuse et de l’expérience croyante de vingt siècles de foi de l’Eglise.
Du Jésus édulcoré au Jésus de l’histoire
C’est cette vision qui s’impose à lui comme théologien et qu’il veut transmettre comme pape. Car, depuis une Cinquantaine d’années, l’image de Jésus fait l’objet des interprétations les plus diverses et les plus fantaisistes. Certaines méthodes d’analyse ont séparé le Jésus de l’histoire du Jésus tel que nous le présentent les évangiles et la foi de l’Eglise : le premier serait une figure aux « contours flous », vidée de sa force et de son message ; le second, une création de la communauté croyante. « cette impression, commente l’auteur, a pénétré profondément dans la conscience commune de la chrétienté. » Et de préciser : « une telle situation est dramatique Pour la foi... L’amitié intime avec Jésus, dont tout dépend, menace de tomber dans le vide. » comme l’a souligné le cardinal Christoph Schönbron, notre public ne réagit plus, ou pas du tout, devant les images « d’un Christ révolutionnaire, d’un mythique réformateur social, d’un amant secret de marie-madeleine... »
Or, au terme de longues années de recherche, mûries dans la méditation, c’est un Jésus enraciné dans une époque et une histoire précises, véritable Fils de dieu, qui s’est imposé à Joseph Ratzinger comme chercheur et comme croyant. Ce livre en est le fruit.
Le vrai visage de Jésus
Ce visage, Benoît XVI le découvre d’abord dans ses racines juives : la tradition des prophètes, la foi d’israël.
Moïse, dit-il, a cherché à voir le visage de dieu ; il ne l’a pas vu, mais a promis un prophète qui nous le montrerait. Ce prophète qui a contemplé le visage de Dieu et nous l’a révélé est bien Jésus de Nazareth. Aussi, dans une grande fresque en dix tableaux (un deuxième volume retracera la Passion, la Résurrection et les évangiles de l’enfance), Joseph Ratzinger nous montre-t-il, preuves à l’appui, ce que Jésus a apporté de vraiment nouveau, et écarte une à une les interprétations fausses ou incomplètes avancées depuis le XIXe siècle jusqu’à nos jours, par des historiens, des exégètes, des philosophes, tel Friedrich Nietzsche qui, au nom de l’homme, refuse un royaume des cieux promis aux pauvres et aux humbles.
Les explications du Pape sont claires. Après avoir souligné l’importance des données historiques fournies par Luc et Jean, il commente tour à tour : le Baptême de Jésus, les tentations qui renvoient aux vraies valeurs spirituelles ; le règne des cieux, présent dans la personne de Jésus ; les béatitudes, une « biographie intérieure cachée » ; la prière, relation intime avec Dieu...
Chaque explication est commentée avec des textes de l’ancien testament, éclairée par les passages parallèles des quatre évangélistes, étayée par les opinions d’exégètes éprouvés, soumise à la critique et appliquée aux situations d’aujourd’hui. Ainsi, à propos du bon Samaritain, il dénonce les failles de l’aide purement matérielle aux populations d’Afrique : « nous avons porté chez eux, écrit-il, le cynisme d’un monde sans Dieu... Nous avons détruit les repères moraux... Nous donnons toujours Trop peu, si nous ne donnons que des choses matérielles. » rien d’étonnant que ces démonstrations fassent autorité et s’imposent à nos choix.
Certes, précise le Pape, « chacun est libre de me contredire ; je ne demande qu’un humble regard de sympathie pour mon travail », mais le sérieux de ce travail et l’érudition qui l’accompagne jouent en faveur non seulement d’un accueil sympathique, mais d’une adhésion à ce visage éternel du Jésus de nazareth.
Jésus a apporté Dieu
« Là réside à vrai dire la grande question qui nous accompagnera à travers tout ce livre : qu’est-ce que Jésus a donc apporté, si ce n’est pas la paix du monde, ni la prospérité pour tous, ni le monde meilleur ?
La réponse est toute simple : Dieu. Il a apporté Dieu. Il a apporté le Dieu, dont la face s’était jusque là lentement dévoilée depuis Abraham, en passant par Moïse et les prophètes...
Jésus a apporté Dieu, et par là la vérité sur notre origine et sur notre fin, et la foi, l’espérance et l’amour. »
(Joseph Ratzinger, Benoît XVI, Jésus de Nazareth, Flammarion)