J’étais étranger...vous m’avez accueilli
La maison est le siège de la communauté familiale, le foyer domestique où les enfants naissent de l’amour vécu par le mari et la femme, où ils apprennent les façons de vivre et les valeurs morales et spirituelles fondamentales qui feront d’eux les citoyens et les chrétiens de demain. A la maison, les personnes âgées et les malades font l’expérience du climat de proximité et d’affection qui aide à surmonter les journées de souffrance et de déclin physique.
Cette vision, quelque peu idéalisée si l’on pense aux situations d’instabilité que vivent de très nombreux foyers et aux déséquilibres psychiques et moraux dans lesquels grandissent réellement les jeunes d’aujourd’hui, est au cœur de la réflexion que Jean-Paul II nous propose pour ce Carême 1997. Notre souci, dit-il, doit être ceux qui sont privés de foyer et de toit. Leur liste est longue: réfugiés, personnes déplacées, victimes des guerres et des catastrophes naturelles, émigrants qui cherchent hors de leur pays de quoi travailler et vivre, ceux qu’on expulse de leur logement, chômeurs et retraités qui n’ont pas les ressources suffisantes pour payer un loyer...
Le logement est un droit, rappelle le Pape: pour chaque personne et pour chaque famille. L’Eglise reconnaît ce droit et sait qu’elle doit contribuer à ce qu’il soit effectivement reconnu. La Bible fournit de nombreux exemples d’hospitalité à l’égard de l’étranger et du sans-abri. Jésus lui-même a connu la situation de ceux qui n’ont pas où reposer leur tête (cf. Mt 8,20) et s’est identifié aux sans-toit que l’on doit secourir: J’étais un étranger et vous m’avez accueilli (Mt 25,35).
Le regard vers ceux qui ont faim (p. 12-14) et vers les sans-toit (cet éditorial) constitue en quelque sorte la colonne vertébrale de ce numéro de mars, situé à mi-chemin entre Carême et Pâques. Le but du Carême est de purifier notre regard; celui de Pâques, de montrer que nous avons acquis un regard nouveau sur nous-mêmes et sur les autres. Quel est ce nouveau regard? Comment le chrétien peut-il y parvenir? Jean-Paul II trace un double chemin: l’expérience de la pauvreté et le partage des difficultés du pauvre.
Faire l’expérience de la pauvreté signifie connaître la profonde détresse de l’affamé, de l’exilé et de l’étranger, mais aussi vivre notre vie comme un pèlerinage, détachés des biens que nous possédons. Le Carême est une occasion providentielle pour effectuer ce détachement spirituel des richesses afin de s’ouvrir à Dieu, vers qui le chrétien doit orienter toute sa vie.
Pratiquer le partage signifie prendre sur soi les difficultés du pauvre. Commentant le passage de Matthieu déjà cité, saint Antoine rappelle que nous devenons sauveurs de nos frères chaque fois que nous pratiquons les œuvres de miséricorde car, en servant le pauvre nous servons Jésus lui-même: J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger... J’étais un étranger et vous m’avez accueilli...
La voie est donc tracée, à chacun de voir comment découvrir dans son entourage les situations de détresse qui empêchent des personnes, des couples et des enfants de vivre une réelle vie de famille. A chacun d’apporter l’aide nécessaire, selon ses possibilités.
Ayant ainsi appris à juger la vie et les biens à leur juste valeur; s’étant exercé à aider les pauvres et les sans-toit, le chrétien est vraiment ressuscité, parce que son regard est neuf: de soi-même, il s’est ouvert aux autres; de son égoïsme, il s’est converti à l’amour et à Dieu.
Puissions-nous être tous au nombre de ces ressuscités.