Sœur Rufina, le sourire de l’Afrique

19 Mars 2015 | par

Un visage jeune, une cinquantaine d’années portées avec joie. Sœur Nduka Asika Chukwuemeka Rufina est le portrait de l’Afrique qui sourit. C’est ainsi que la décrivent Silvia et Claudia, les secrétaires de la Caritas Saint-Antoine, qui l’ont accueillie, il y a environ deux ans, avec sa sœur – Padouane d’adoption – dans leurs bureaux. Sœur Rufina est nigérianne et appartient à une congrégation locale, The Holy Family Sisters of the Needy, qui s’occupe en particulier des petites filles et des jeunes femmes en difficulté, car elles sont les plus pauvres et les plus marginalisées au monde. « J’étais à Padoue, mais ma tête était encore au Nigeria, raconte sœur Rufina. On venait de me confier une tâche difficile que je ne savais comment accomplir. Une personne privée avait donné un bâtiment non achevé et presque englouti par la forêt à Nza Ozubulu, un village proche de Anambra au sud-est du Nigeria, avec l’intention d’en faire une clinique pour les pauvres. On en avait grandement besoin dans cette région car le premier dispensaire est à 30 km et 600 000 personnes se trouvent dépourvues de toute aide médicale. »

« Frappe et l’on t’ouvrira », dit l’Évangile. Sœur Rufina fait partie des personnes qui prennent cela à la lettre. Elle se trouve à Padoue lorsqu’elle songe que la première porte à laquelle elle pourrait frapper est celle de saint Antoine. Et là voilà donc partie pour la Caritas Saint-Antoine, à cette rencontre entre deux femmes africaines et deux femmes italiennes. « Silvia m’a fait asseoir et m’a expliqué comment procéder pour demander de l’aide. Une fois rentrée au Nigeria, je me suis mise au travail. »

« Elle m’a dit tout simplement qu’elle souhaitait rénover une clinique de 15 chambres au milieu de la forêt - raconte Silvia. Sur le coup, j’ai trouvé que c’était une demande exagérée, presque naïve. Mais cette petite sœur avait quelque chose de plus que je ne saurais expliquer. » Silvia en parle au directeur, le père Valentino Maragno, qui trouve le projet intéressant mais qui propose néanmoins d’avancer doucement », en commençant par quelque chose de petit et de contrôler chaque étape. Quelques mois plus tard, la Caritas Saint-Antoine approuve la construction du puits de la nouvelle clinique. Le résultat est extraordinaire : « Des comptes rendus très détaillés ont commencé à arriver que même des collaborateurs experts ne rédigeraient pas aussi bien. » Dès lors, on peut oser faire le grand saut : les 15 chambres dans la forêt.

Entre-temps, sœur Rufina a frappé à de nombreuses portes : elle a réussi à récolter 10 000 €, mais il en fallait encore 35 000 pour réaliser son rêve. « Nous effectuons le premier versement d’argent, continue Silvia. Sœur Rufina suivait tous nos conseils et requêtes scrupuleusement, allant à l’encontre des idées reçues sur les “temps africains”. » En quelques mois, sa clinique, verte comme la mer, brillait comme un bijou parmi les arbres de la forêt.

« Travailler avec la Caritas Saint-Antoine, explique sœur Rufina, a été l’une des plus grandes inspirations de ma vie. Cette rencontre a changé mon sens de la responsabilité, ma façon de gérer l’argent et, surtout, mon idée de la charité. De retour à Padoue, j’ai pris des photos dans les bureaux de la Caritas Saint-Antoine en expliquant que j’allais les exposer dans la clinique en signe de gratitude. On m’a dit de ne pas le faire car “nos bienfaiteurs souhaitent rester anonymes”. Quant à moi, j’ai pensé que votre charité était celle de Dieu. »

 

La clinique vert espoir

Maintenant que la clinique est terminée, les habitants sont heureux : « Ils la considèrent non seulement comme un service important – explique sœur Rufina – mais aussi comme une source de travail. » La clinique verte est déjà une bénédiction pour une famille très pauvre, avant même qu’elle ne commence à fonctionner : « J’ai embauché en tant que jardiniers à temps partiel un couple qui a six enfants. Ils n’ont pas de maison, deux de leurs enfants habitent avec une autre famille et je pensais en emmener un autre chez ma mère. J’aime cette famille car elle est toujours heureuse, bien qu’elle ne possède rien. »

La plupart des gens dans cette région n’arrivent pas à prendre trois repas par jour, n’ont pas accès aux services d’hygiène et à l’eau potable. Cela aggrave la situation sanitaire de la zone où la mortalité est très élevée. La clinique sera une bénédiction pour tous, mais tout particulièrement pour les femmes enceintes et les enfants en bas âge, les deux catégories les plus à risque. Rufina nous rappelle avec simplicité qu’« il n’y a pas de façon occidentale ou africaine d’aider les autres. Tout dépend de la sincérité, de la capacité d’apprendre les uns des autres, en sachant que chacun possède sa propre intelligence, sa propre technique, ses propres ressources. Cet hôpital en est un exemple. Nous avons encore beaucoup à apprendre des Européens mais les Européens aussi peuvent apprendre des Africains pour revenir à l’Évangile, pas seulement spirituellement mais aussi économiquement. Les deux, en tous cas, ont besoin de partager ressources et expériences ».

Sœur Rufina est actuellement à la recherche de meubles et de l’équipement de base pour faire démarrer l’hôpital. Les autorités locales fourniront un médecin, une infirmière, un technicien de laboratoire, du personnel de service et les sœurs vont participer et pas seulement pour ce qui est de la gestion : « Je suis infirmière et sage-femme – explique sœur Rufina. J’ai toujours été, même avant de devenir religieuse, du côté des jeunes femmes enceintes, seules et en difficulté. Rester ici parmi les plus pauvres est un accomplissement. Cela me donne l’impression de partager le mystère contenu dans la Trinité, l’amour miséricordieux du Christ, la joie de redonner la vie à ce qui paraît ne pas en avoir. L’espoir pour moi est quelque chose que l’on touche : si l’on a confiance, on trouve ce que l’on cherche. »

Sœur Rufina a envoyé ses salutations aux lecteurs et amis du Messager qui ont soutenu ce projet : « Chers bienfaiteurs, je vous remercie de tout cœur. Que Dieu vous bénisse et vous récompense. Votre façon de faire acte de charité est très spirituelle et pour cette raison je sais que Dieu vous conduira au paradis, lieu où nous, les chrétiens, plaçons tout notre espoir. J’aimerais un jour pouvoir rencontrer quelques-uns d’entre vous personnellement. » 



Le projet en bref

Projet : construction d’un puits et rénovation d’une petite clinique

Lieu : Nza Ozubulu, Nnewi, Anambra, Nigeria

Période : août 2013 – décembre 2015

Coût : puits 8 300 €, restructuration 35 000 €

Updated on 06 Octobre 2016