Pour l’avenir des réfugiés syriens
Je me trouve au Liban, à Zhale, à environ 60 km à l’est de Beyrouth. En face de moi la plaine de la Bekaa. Autour de moi, juste une série de lopins de terre où poussent, comme des champignons, les tentes des réfugiés syriens. Au-delà de la montagne, se trouve la Syrie, la guerre, les atrocités de Daesh ; de ce côté-ci de la montagne, une trêve forcée, une attente sans fin. Ici l’espoir peut naître ou bien mourir. Ces temps difficiles demandent aux Frères Franciscains et aux bienfaiteurs de la Caritas Saint-Antoine d’agir pour que des peuples puissent retourner chez eux, sans risquer leur vie sur une barque. Nous cherchons à avoir le même regard que saint François et que saint Antoine envers les derniers.
C’est dans cet esprit que je vous propose le projet choisi pour le 13 juin. Au premier abord, il s’agit d’un projet assez simple : nous allons construire à Zhale un Centre Caritas dédié à saint Antoine. Mais il ne s’agira pas d’un centre Caritas comme les autres. Nous partirons de la diversité de ses « clients » : des réfugiés syriens et irakiens, des chrétiens persécutés, des pauvres de la périphérie de Zhale. Un beau mélange de religions et de nationalités. Au cœur de tout, se trouve la petite communauté franciscaine de Zhale, quatre frères soutenus par des bénévoles laïques.
Un couvent dans la tempête
Le couvent des frères à Zhale, consacré à saint François, a été fondé en 2010. Le but était de créer une maison de formation pour les frères. Mais les besoins des personnes et des nombreux réfugiés l’ont transformé en port. Là, des femmes cuisinent à tour de rôle des repas pour ceux qui ne peuvent pas les préparer eux-mêmes, les scouts s’occupent de la récolte de nourriture, les franciscains laïques de l’Ofs organisent toutes sortes d’activités pour les pauvres. Le chef d’orchestre est un frère tranquille et généreux. Il s’appelle César, il a 45 ans, il est libanais. Il s’active dans cette confusion avec une nonchalance désarmante, il gère tout comme un médecin du service des urgences. L’image de l’Église comme hôpital de campagne, si chère au pape François, est ici réelle. « Vois-tu Giancarlo, m’explique-t-il, nous pouvons le faire car nous sommes comme eux. Nous sommes le point de rencontre de divers mondes, mais être franciscains nous aide à transformer la douleur et les différences en une occasion de partage. Au Liban – continue-t-il – nous vivons un grand défi. Il y a 4 millions d’habitants et 2 millions de réfugiés. La majorité vient de Syrie, mais il y a aussi des Irakiens dont la plupart sont chrétiens et environ 800 000 réfugiés palestiniens arrivés ici suite aux guerres israélo-arabes. Et nous avons aussi de nombreux pauvres de chez nous, résultat des guerres qui ont longuement ensanglanté le Liban. » Je compare spontanément la situation de ce petit pays, que César présente sans angoisse, avec les réactions parfois hystériques de l’Europe où certains veulent construire des murs sans chercher de véritables solutions.
Le camp de réfugiés
Les frères concentrent leur aide sur le camp d’El Fayda qui accueille environ 500 personnes dont de nombreux enfants et adolescents. « Dans une situation de précarité comme celle-ci – m’explique César – il n’est pas suffisant de donner à boire et à manger. Il faut aussi construire l’espoir. »
Arrivé à El Fayda, ma première impression est celle d’une grande dignité. Il y a des tentes et des masures en matériel de récupération, mais tout est en ordre. La deuxième impression est celle du bonheur : les enfants semblent heureux, malgré tout. Au camp, les frères apportent de l’eau potable dans leur camionnette avec laquelle ils transportent aussi de la nourriture, des médicaments ou des marionnettes pour amuser les enfants. Les bénévoles passent avec des repas chauds au moins deux fois par semaine. Mais deux tentes font la différence : elles sont le centre des activités des frères et des bénévoles. « Nous ne venons pas que pour laisser de la nourriture et repartir comme cela arrive ailleurs, mais pour partager, reconstruire l’avenir ». Sous les tentes des frères, on va à l’école, on joue, on dessine, on participe à des activités récréatives. « Parmi les bénévoles, il y a aussi des psychologues qui aident femmes et enfants à dépasser les traumatismes de la guerre, et d’autres opérateurs qui font de la formation contre les violences, malheureusement, très fréquentes dans les camps. »
Je suis soulagé en entendant les voix joyeuses des enfants. Des bancs, un tableau noir et des feutres peuvent changer le monde. « Ici, c’est ainsi – intervient le père César – mais dans de nombreux autres camps, il n’y a rien. Le risque est de perdre l’espoir. »
Petits ruisseaux et grandes rivières
Je demande au père César comment nous pouvons l’aider. « Le but principal est de transformer la précarité en stabilité, le temps vide en avenir, me dit-il. Il serait vraiment utile d’avoir un centre Caritas d’où coordonner toutes les activités. Nous l’appellerons “Centre Caritas Saint-Antoine”. Au départ, il servira surtout aux réfugiés, mais à l’avenir il deviendra une ressource importante pour lutter contre toutes les formes de pauvreté au Liban. » Les frères ont repéré deux salles de 60 m2 dans un édifice qui abrite les activités artisanales de Zhale. « Nous ne voulions pas construire un nouveau bâtiment mais plutôt nous intégrer dans la réalité de la ville et être plus proches des personnes que nous aidons et de celles qui nous aident. Il faudra restaurer et équiper les salles. » Au centre, il y aura une grande cuisine populaire et un atelier de blanchissage et de couture pour réparer les vêtements récupérés. Le but est double : mieux organiser les aides et créer, avec la collaboration des artisans locaux, une école des arts et des métiers pour offrir une perspective aux jeunes. « Les premiers temps, nous payeront des bourses d’étude pour les jeunes qui sont le plus en danger. Quand le centre sera prêt, nous penserons à une formation plus organisée. Notre objectif est aussi d’amener l’école et les activités récréatives dans d’autres camps. Chaque jour, je reçois des requêtes de la part des réfugiés qui ont vu ce que nous avons fait à El Fayda et qui nous demandent d’en faire autant dans leur camp. Je crois que votre soutien nous permettra de rejoindre de nombreux autres enfants. »
Les petits ruisseaux font les grandes rivières, le père César me l’a démontré maintes fois ces jours-ci. C’est pourquoi je vous invite à rester avec moi, avec les frères et les bénévoles du Liban en cette terre où l’urgence devient une ressource, la différence une richesse.
LE PROJET EN BREF
Réalisation du Centre Caritas Saint-Antoine : 181 900 euros
Achat d’équipements : 75 800 euros
Cours de formation professionnelle : 40 000 euros
Contribution aux besoins de première nécessité des réfugiés : 32 300 euros
Coût total : 330 000 euros