Contempler une icône
Le mot est beau, il sonne ample et plein : “Icône”, du grec eikôn, l’image. Il évoque avant tout le Christ, « l’Image du Dieu invisible, le premier-né de toute création » (Col 1, 15-16). C’est parce que le Verbe s’est fait chair, que des “représentations” de Dieu sont devenues possibles. « Qui m’a vu a vu le Père », dit Jésus à Philippe (Jn 14, 9).
Pour les Hébreux, il était en effet inconcevable, ou plutôt rigoureusement interdit, d’imaginer une quelconque figuration de Yahvé, le Seigneur, au-delà de toute prise humaine : « Tu ne te feras aucune image sculptée, rien qui ressemble à ce qui est dans les cieux, là-haut, ou sur la terre, ici-bas, ou dans les eaux, au-dessous de la terre » (Ex 20, 4). Et le risque a toujours existé de s’attacher à la représentation matérielle, en oubliant le Maître invisible vers qui elle fait signe. Tant d’idoles, tant de veaux d’or (cf. Ex 32) construits de mains humaines, adorés par les hommes au détriment du seul vrai Dieu.
C’est à ce danger que s’en est pris le courant “icono-claste” (de klazein, “briser les icônes”), lors de la querelle des images au VIII et IXe siècles. La vénération des icônes ne conduirait-elle pas à confondre les deux natures humaine et divine de Jésus Christ ? Au contraire, répond Jean Damascène, le grand théologien du parti adverse, elles manifestent la sanctification de la matière inaugurée par l’incarnation du Fils du Père.
Puisque Dieu s’est donné à voir, entendre et toucher en l’homme Jésus, il est légitime et opportun de « dessiner le visage du Fils » afin de conduire le regard intérieur vers la splendeur de la divinité. Les peintres d’icônes réalisent d’ailleurs leurs œuvres dans un climat de prière, comme un authentique témoignage de foi, selon des règles et des codes extrêmement précis. Et ils inscrivent toujours sur leur œuvre un nom ou une phrase qui renvoient à l’Ecriture et rappellent que l’image ne sert que de tremplin, afin de voir au-delà d’elle. Comme une fenêtre ouverte sur l’infini de Dieu.
Prier devant une icône figurant le Christ, une scène de sa vie, Marie ou l’un des Saints, revient donc à se laisser pénétrer par la lumière du Sauveur et à affiner ses sens spirituels jusqu’à atteindre les réalités divines. Certes, la présence de Dieu dans l’icône n’est pas du même ordre que sa “présence réelle” dans l’hostie consacrée à laquelle le Christ s’identifie corporellement. C’est pour cela que l’on dit du reste “adorer” le saint Sacrement mais “vénérer” l’icône.
Cependant la spiritualité orientale d’où est issue la tradition des icônes nous apprend à cheminer vers la contemplation de Celui qui nous accompagne à toutes les étapes de nos vies, avec l’icône du saint patron, reçue au jour du baptême, celle de la Vierge, cadeau du mariage, ou celle de la Sainte Famille placée au cœur du foyer domestique et illuminée d’une lampe fervente. L’icône exprime à la fois l’abaissement de Dieu vers l’humanité et l’élan de l’être créé vers son Seigneur. n
QUIZ
1. Comment s’appelle le courant opposé aux icônes ?
a. Sapajour
b. Bachibouzouc
c. Iconoclaste
2. Qu’est-ce qu’une icône comporte toujours ?
a. Un cadre doré
b. Un nom ou une phrase de la Bible
c. Une auréole
3. Quel est le terme utilisé pour la prière devant l’icône ?
a. Adoration
b. Etonnement
c. Vénération
Réponses : 1.c – 2.b – 3.c