Un avent pour la vie
Le premier dimanche de l’Avent a revêtu en 2010 une tonalité particulière. À l’invitation du Saint-Père, les diocèses du monde entier se sont mobilisés pour prier pour la vie naissante. En France, pas moins de 450 veillées de prière ont été organisées en signe de communion avec le Pape ; beaucoup ont compris l’urgence de la prière.
Il y avait foule en la basilique Saint-Pierre le 27 novembre dernier pour cette veillée de prière pour la vie qui venait clore le Congrès international promu par le Conseil pontifical de la famille qui se tenait à Rome du 25 au 27 novembre 2010 sur le thème « Famille chrétienne, sujet de l’évangélisation ».
Des extraits de l’encyclique de Jean-Paul II Evangelium vitae ont été lus en italien. Le Saint-Père est ensuite arrivé et a exposé le Saint-Sacrement. Pendant l’adoration, il a lu solennellement une prière pour la vie naissante avant de célébrer les premières Vêpres de l’Avent. « Avec Marie, ta Mère, la grande croyante, dans le sein de laquelle tu as assumé notre nature humaine, nous attendons de toi, notre unique et vrai Bien et Sauveur, la force d’aimer et de servir la vie ».
Panorama
On le sait : les lois de bioéthique élaborées en 1994 prévoyaient une révision tous les cinq ans. Une nouvelle loi doit donc être votée début 2011 et un projet de loi a été présenté en Conseil des ministres en octobre dernier. Qu’en est-il ? Le texte maintient le « principe d’interdiction de toute recherche » sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires, des dérogations à cet interdit étant toutefois possibles. Avec la loi de 2004, seules la nécessité de « progrès thérapeutiques majeurs » et l’absence de « méthode alternative d’efficacité comparable » conditionnaient ces dérogations. Avec la nouvelle loi, « la condition de “progrès thérapeutique majeur” est remplacée par celle de “progrès médical majeur” beaucoup plus vague », estime la Fondation Jérôme Lejeune qui œuvre pour la recherche sur les maladies de l’intelligence d’origine génétique.
Personne ne peut nier aujourd’hui que des alternatives à la recherche sur l’embryon existent. En effet, les avancées scientifiques ont montré le fort potentiel des cellules souches adultes ou de sang de cordon d’un point de vue thérapeutique, des avancées qui vont dans le sens du respect de la vie.
Pour ce qui est du dépistage prénatal (DPN), notamment de la Trisomie 21, celui-ci est systématiquement proposé aux femmes enceintes depuis 1997. Selon la Fondation Lejeune, 96 % des fœtus trisomiques dépistés sont avortés, un chiffre qui fait froid dans le dos. On peut se demander si ce dépistage généralisé de la Trisomie 21, qui prévoit dans le projet de loi de nouveaux prescripteurs, les sages-femmes, ne tend pas à devenir une pratique eugénique. Une dérive qui va à l’encontre même du code civil (article 16-4 : « Toute pratique eugénique tendant à l’organisation et à la sélection des personnes est interdite »). Que de contradictions…
Courant novembre 2010, on a assisté à un revirement dans les orientations de la mission parlementaire sur la bioéthique que conduit le député Jean Leonetti. Celui-ci déclarait dans le Journal du Dimanche : « Pour moi, il est urgent d’autoriser la recherche sur l’embryon non destiné à naître, une bonne fois pour toutes, en mettant à bas le système actuel de dérogations, la recherche sur les cellules souches embryonnaires ». Une position qui va à l’encontre de ce qu’il affirmait jusqu’alors.
Réactions
Lors de l’assemblée générale des évêques à Lourdes, le 9 novembre 2010, le cardinal André Vingt-Trois a fermement réagi aux propos de Jean Leonetti en dénonçant « l’opinion versatile […] comme si la responsabilité dans le respect de la dignité humaine était à géométrie variable selon que l’on est scientifique ou que l’on est politique ». « Je crains, s’inquiète-t-il, qu’on change de finalité, que le cadre de référence reste peut-être le respect de la dignité humaine, mais devienne une coquille vide et que la recherche scientifique et ses impératifs passent avant tout. Je crains que l’on privilégie une option unique de recherche qui ignore les autres voies et se laisse enfermer dans une logique industrielle ».
Quant à la Commission d’éthique protestante évangélique (CEPE), celle-ci estime, dans La Croix du 9 décembre dernier, que le projet de loi français actuel « continue sur la pente glissante de son exploitation déshumanisante ». Elle considère aussi « comme un vrai danger » le pouvoir accru accordé à l’Agence de Biomédecine. Il faut rappeler qu’il est prévu de supprimer la révision de la loi tous les cinq ans ; il en découle donc un risque d’octroyer un plus grand pouvoir aux agences indépendantes, notamment à l’Agence de Biomédecine.
Peut-être l’Église ne s’est-elle jamais exprimée avec autant de précision et d’engagement au sujet du respect de la vie. Elle a cherché à participer au débat démocratique. Ainsi, des documents comme ceux rédigés par Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, Dol et Saint-Malo (Au cœur du débat bioéthique ou Dignité et vulnérabilité), ont été remis aux parlementaires. Mgr d’Ornellas a piloté un groupe de travail sur la bioéthique. En trois ans, le groupe a consulté une dizaine d’experts dans les domaines scientifiques, juridiques, éthiques ou théologiques. Ceci afin de poursuivre le dialogue pour éviter que des portes jusque-là entrouvertes ne deviennent des portes battantes.
Défendre la vie...
Si Benoît XVI a souhaité une prière mondiale pour la vie, c’est que la France est loin d’être l’unique pays où la vie est menacée à son commencement, mais aussi à son terme. Aux États-Unis, un décret de Barack Obama de mars 2009 a levé l’interdiction décidée par son prédécesseur George W. Bush d’un financement fédéral de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Depuis, des scientifiques et des organisations ont fait appel, mettant en avant que l’embryon est un être humain et que l’État ne peut financer des recherches qui provoqueraient sa destruction, même pour sauver des vies. En Espagne, le gouvernement vient d’annoncer qu’il approuvera en mars 2011 un projet de loi sur « les soins palliatifs et la mort digne », donnant ainsi le droit aux malades de refuser une prolongation artificielle de leur vie. Des dérives inquiétantes…
Le Saint-Père a repris l’appel de Jean-Paul II en faveur du respect de la vie et ajoute : « J’exhorte les acteurs de la politique, de l’économie et des communications sociales à faire tout leur possible pour promouvoir une culture toujours respectueuse de la vie humaine, pour fournir des conditions favorables et des réseaux de soutien pour son accueil et son développement », a-t-il ajouté avant de confier à « la Vierge Marie qui a accueilli le Fils de Dieu fait homme » la prière et l’engagement en faveur de la vie.
Pirère pour la vie
« Seigneur Jésus, nous t’adorons et nous te bénissons. […] Réveille en nous le respect pour toute vie humaine naissante, rends-nous capables de discerner dans le fruit du sein maternel l’œuvre admirable du Créateur, dispose nos cœurs à l’accueil généreux de tout enfant qui vient à la vie. […] Accompagne de la lumière de ton Esprit les choix des assemblées législatives, pour que les peuples et les nations reconnaissent et respectent le caractère sacré de la vie, de toute vie humaine. Guide le travail des scientifiques et des médecins, afin que le progrès contribue au bien intégral de la personne et qu’aucun être ne soit supprimé ou ne souffre l’injustice. »
Benoît XVI