Rencontre avec... Thierry Bizot

17 Mars 2009 | par

Producteur d’émissions à succès (Capital, Sept à huit), Thierry Bizot a rencontré Jésus lors d’une catéchèse pour adultes à laquelle il s’était rendu pour faire plaisir au professeur de son fils. Dans Catholique anonyme1, il raconte avec beaucoup d’humour cette expérience qui a changé sa vie.



Vous avez accepté cet entretien avec beaucoup d’enthousiasme… Témoigner, c’est un devoir pour vous ?

Je me sens extrêmement chanceux. C’est cette reconnaissance qui me pousse à raconter mon histoire dès que j’en ai l’occasion. Et plus je la raconte, plus je prends conscience de ce qui m’est arrivé. Comme je le dis dans mon livre, j’ai le sentiment que Dieu m’a attrapé par le cou, comme un lapin dans son clapier, et qu’il m’a demandé : « C’est qui le patron ? » Je lui ai répondu : « C’est toi », et il m’a reposé, me laissant retourner à ma vie paisible. D’où ces deux questions que je ne cesse de me poser : « Pourquoi moi ? » et, « Est-ce que cela va durer ? »



Avez-vous des réponses à ces interrogations ?

Non, pas vraiment. D’ailleurs, depuis quelque temps, je me pose moins la deuxième question. Je fais davantage confiance. Elle s’est plutôt transformée en « Pourquoi faire ? » D’après un ami prêtre, je n’ai qu’à attendre que Dieu me le fasse savoir…



Quelle place tenait la religion dans votre vie avant votre conversion ?

Une place quasi nulle. J’allais à la messe à Noël, aux mariages et aux enterrements, c’est tout ! Avec un certain plaisir toutefois. Cela me rappelait mon enfance. A 20 ans, j’ai cru m’émanciper de ma famille en m’arrêtant d’aller à la messe. Je m’affranchissais d’une obligation enfantine. Ce qui ne m’a pas empêché, plus tard, de me marier à l’Eglise et de faire baptiser mes trois enfants. Pour moi, c’était comme les vaccins, je faisais le minimum…

En fait, je ne m’étais jamais vraiment penché sur la question. A mes yeux, la religion catholique, c’était une énorme institution un peu grandiloquente, rigide et froide, composée de gens tristes. Je voyais les croyants comme des espèces de sages, franchement embêtants, un peu intellos. Bref, je n’avais pas du tout envie de m’y intéresser…



Jusqu’à ce rendez-vous avec un prof de votre fils…

Je suis convoqué pour parler de la baisse de ses résultats. Mais à peine arrivé, le prof me dit que mon fils est plutôt bon élève et qu’il a juste voulu le rappeler à l’ordre avec ces deux avertissements. Bon. On aurait pu en rester là, mais le prof m’inspirait confiance et je me suis mis à lui parler de mes difficultés à être père. Il a alors eu ces mots qui m’ont touché : « Votre fils a devant lui l’exemple d’un père fort, qui parle bien et qui réussit ce qu’il entreprend. Cette image doit lui peser. Peut-être pourriez-vous lui montrer vos faiblesses, lui faire part de vos doutes ? » J’en ai été ému aux larmes. Aussi, quand un an après, je reçois de sa part une invitation à une soirée de catéchèse « en souvenir d’une bonne conversation », je ne vois pas d’autre choix que de m’y rendre.



Et là, vous découvrez une assemblée pas très éloignée de l’image que vous aviez des catholiques…

L’horreur ! Je me suis retrouvé dans un gymnase sinistre qui sentait encore la transpiration. Dans ce traquenard, nous étions six victimes… face à neuf “profs” assis en arc de cercle devant nous. Ils me faisaient presque de la peine… Ce n’était pas un triomphe populaire leur truc !



Et malgré tout, vous décidez d’y retourner…

Allez comprendre ! Une fois rentré chez moi, puis de retour à mon travail, je n’ai pas cessé de penser à ce que nous avait dit le petit prêtre barbu pendant la catéchèse : « Nous voulons que Dieu vous frappe en plein cœur et qu’il change votre vie. » Rien que ça ! Mais il avait eu l’honnêteté d’ajouter : « Ce n’est pas sûr que nous y arrivions. » J’ai aimé sa franchise…



Finalement, Dieu vous a attiré par le canal le moins susceptible de vous plaire ?

C’est là toute sa délicatesse. Il aurait pu me faire venir dans une assemblée flamboyante, composée de jeunes filles branchées… Mais au lieu de cela, il m’a plongé dans un univers de vieux ringards… Je n’ai pas été trompé sur la marchandise, c’est comme s’il me disait : « On est d’accord, c’est moche, c’est chiant, mais viens voir quand même. » Il a respecté mon libre choix.



Vous avez vécu ces deux mois de catéchèse dans un mélange d’attraction et de réticences… De quoi aviez-vous peur ?

De devenir croyant, tiens ! Encore aujourd’hui, il m’arrive d’avoir peur car il y a une forme de perte de contrôle dans la foi…



A quel moment tout a basculé ?

Tout s’est passé très progressivement. Comme lorsqu’on est convalescent et qu’on se surprend chaque jour à aller mieux que la veille. Mais il y a tout de même eu deux moments forts : d’abord lors de cette soirée où, commençant à faire le pitre devant notre minable assemblée, j’ai été saisi par une émotion incontrôlable. Et à la fin du parcours : lorsque tout d’un coup, j’ai réalisé que moi aussi j’étais un bras cassé. Un caniche mouillé. Comme eux.



Qu’est-ce que votre conversion a changé dans votre vie ?

Ma vie n’a pas changé, mais cela a changé ma vie. Je me lève en pensant à Jésus, je me couche en pensant à Jésus. Il est là tout le temps, je ressens sa présence à travers des petites bouffées de bonheur.



Dans votre livre, vous parlez beaucoup de votre femme qui craint que vous ne soyez rentré dans une secte… Que pense-t-elle de votre conversion ?

Je pense qu’elle est consciente de ce que la foi a changé en moi, elle doit d’ailleurs en récolter quelques bénéfices, mais elle n’adhère pas pour autant à la religion catholique. De manière générale, elle est même assez énervée par Benoit XVI et n’est pas très sensible à l’Eglise, à la messe… Mais, est-ce que cela m’attriste ? Je ne crois pas. Souvent j’entends les gens dire qu’ils prient pour que leur conjoint se convertisse. Moi non. J’en serais très heureux, bien sûr. Mais pour le moment, cela reste mon petit domaine à moi.

Votre foi a-t-elle changé votre rapport angoissé à votre travail, modifié votre façon de diriger ?

Que je sois devenu plus serein, c’est une certitude. Quant à ma façon de manager… C’est un peu tôt pour le dire… Ce qui a changé, c’est que je respecte davantage mon travail. Avant je le considérais comme un truc un peu méprisable. C’était ma manière de me protéger des aléas de mon métier qui font qu’un jour on est une star, et le lendemain un nul. Aujourd’hui, j’arrive à faire la distinction entre ma valeur d’une part, et mes échecs et mes succès d’autre part.



Pourriez-vous envisager de mettre vos compétences en communication et en marketing au service de l’Eglise ?

Au début, j’y ai pensé. Je me voyais déjà produire une émission sur Dieu en prime time… ou refaire tout le marketing de l’Eglise, persuadé qu’avec tout ce que je savais faire, cela marcherait beaucoup mieux…

Mais quel orgueil ! Et la délicatesse de Dieu alors ?



QUESTIONNAIRE DE SAINT-ANOINE



Connaissez-vous saint Antoine de Padoue ? Quelle image avez-vous de lui ?

Saint Antoine, c’est bien le saint qui retrouve les objets égarés ? A part cela, je ne connais rien de lui… Mais, je ne suis pas très saint… Même avec la Vierge, je ne suis pas encore très à l’aise. Pour le moment, j’en reste à ma découverte de Jésus.



Etes-vous déjà allé à Padoue ? Quel souvenir en gardez-vous ?

Etant né à Milan, Padoue est une ville que j’ai eu l’occasion de découvrir quand j’étais enfant… Mais je n’en garde pas de souvenir précis… Désolé !



Quand vous sentez-vous le plus proche de Dieu ?

Le soir avant de m’endormir. C’est le meilleur moment, je m’apprête à m’endormir dans ses bras. Sinon, il m’arrive souvent d’avoir des petites bouffées de tendresse qui m’étreignent le cœur. Cela peut être dans la rue, au cours d’une réunion…



Comment priez-vous ?

Voilà une question à laquelle je n’ai pas de réponse… Je ne sais pas comment m’y prendre pour prier. J’ignore jusqu’à la manière avec laquelle je dois m’adresser à Dieu…Dire “Jésus” me semble trop familier…Généralement, je dis “mon Dieu”…



Qu’est-ce qui vous a rendu le plus heureux cette année ?


D’une part de continuer à sentir la présence de Jésus dans ma vie, avec tout ce que cela implique de joie et de sérénité. Et d’autre part d’avoir la chance d’en témoigner. Cette année, j’ai eu l’occasion de parler devant de nombreux groupes. C’est à chaque fois très touchant.





Updated on 06 Octobre 2016