Rencontre avec... Hadrien Lecoeur
Vous animez Dieu merci ! depuis 3 ans. Il est temps de faire connaissance…
J’ai 30 ans, un début de formation en Droit qui a réussi à me dégoûter de la fac (et du Droit !), et une volonté ferme de donner un sens à ma vie. Ce dernier point m’est apparu lors d’un voyage humanitaire en Inde. J’étais alors étudiant à l’université d’Assas, à Paris. Pour la première fois de ma vie, j’ai eu le sentiment d’être utile : en posant une brique sur une autre pour bâtir le mur d’un orphelinat à Calcutta, j’ai réalisé combien cela donne un sens à sa vie de travailler pour les autres. En rentrant, j’ai eu envie d’arrêter de perdre mon temps dans les couloirs de la fac pour me lancer dans un projet plus constructif. C’est comme cela que je suis arrivé en école de journalisme.
Faire réfléchir, aider les gens à se poser des questions, c’est un métier qui me convient bien, même s’il m’arrive de douter de la résonance de mon travail : mon émission est vue par environ 30 000 personnes. C’est assez peu ! A la fin d’un plateau, je suis parfois découragé. Mais il suffit qu’un technicien vienne me voir pour me poser des questions sur l’émission pour que je considère que c’est gagné.
La foi semble tenir une place importante dans votre vie !
Oui, cela a toujours été important pour moi… C’est étonnant car je ne suis pas issu d’une famille très pratiquante, je n’ai jamais fait de scoutisme… Je ne sais pas ce qui s’est passé… Il y a eu l’Inde, la rencontre avec un prêtre, le P. Grimaud, qui était directeur du Foyer des Francs-bourgeois.
Animer une émission religieuse, c’était un choix ?
Aujourd’hui, si mon but est clairement d’évangéliser les téléspectateurs, ce n’était pas du tout mon objectif quand je suis arrivé sur la chaîne.
Au départ, il y avait même une part d’opportunisme : j’ai appris que Vincent Bolloré travaillait à la création d’une nouvelle chaîne sur la TNT et qu’il souhaitait proposer une émission religieuse. J’y ai vu une occasion unique de participer à une belle aventure. Avec une petite équipe d’amis, nous avons imaginé un concept d’émission religieuse que nous sommes allés lui soumettre. Non seulement Bolloré a été emballé, mais il a dit : « OK pour l’émission, à condition que ce soit toi, Hadrien, qui présente ! » Sacré challenge pour le jeune journaliste issu de la presse écrite que j’étais !
Alors certes, je n’aurais certainement pas dépensé autant d’énergie pour animer une émission people, c’était tout de même l’excitation d’assister à la création d’une chaîne qui primait. “Direct 8”, au début, c’était la Start up de la télévision, il n’y avait pas de stars… Et avoir un patron qui disait : « Faites vos émissions sans vous soucier de l’audimat », c’était galvanisant. Je suis plein d’admiration pour Vincent Bolloré, pour son charisme et sa détermination.
Quel souvenir gardez-vous de votre première émission ?
A la fois hyper flippant, et incroyable : c’était le jour de la mort du pape Jean-Paul II. Pour un premier passage à la télévision, je pouvais difficilement rêver plus fort !
Cette émission, c’est un peu un OVNI dans le PAF… Quelle est son ambition ?
Face au regain d’intérêt pour le sacré, mais aussi face aux idées reçues, nous voulons proposer un regard « simple, original et positif sur la foi ». Simple car nous sommes obligés de faire preuve de beaucoup d’humilité, rien n’est jamais assez beau quand il s’agit de religion. Nous devons nous reposer sur nos interlocuteurs, avoir confiance…
Vous arrive-t-il de prier avant une émission ?
Oui, souvent. Même si ce ne sont que trois mots en sortant du maquillage…
« Original et positif » ?
Original car nous voulons sortir des sentiers battus et présenter d’autres figures d’Eglise, d’autres têtes que celles qu’on nous montre – ou qui se montrent ? – tout le temps. Et enfin positif car nous souhaitons relayer le message de l’Eglise avec un peu plus de bienveillance que d’habitude…
Que pensez-vous du traitement de la religion dans les médias ?
Je ne comprends pas comment on est arrivé à autant de mépris. La semaine dernière, pour préparer une émission sur le lien entre la foi et la raison, j’ai relu le discours de Ratisbonne qui avait fait tant de bruit il y a deux ans. C’est un texte remarquable ! Je suis stupéfait par l’écho que les médias en ont donné. Au point que je me demande si les journalistes l’ont vraiment lu, ce texte…
Comment êtes-vous perçu par vos “collègues” de la chaîne ?
Quand on anime une émission religieuse, on n’est pas aidé ! Pour beaucoup, je suis un extra-terrestre, le petit catho de service, imposé de surcroît par la volonté du patron. Au début, je sentais beaucoup d’étonnement ; cela a suscité quelques discussions. Maintenant, c’est plutôt l’indifférence, mais les techniciens ont vu que je savais rester courtois si mon micro était mal branché ou si les lumières étaient mal réglées, ce qui est rare dans ce milieu ! Notre équipe est donc respectée mais je sens que ma légitimité est toujours remise en cause et d’autant plus que nous ne faisons pas de carton d’audience. Chaque semaine, c’est une sacrée leçon d’humilité que je prends !
Il existe une chaîne exclusivement consacrée à la religion (“KTO”), pourrait-on envisager de vous y voir ?
Non je ne pense pas, car je trouve plus intéressant d’animer une émission religieuse sur une chaîne généraliste : là au moins, le message qu’on fait passer est mis en relief. Et l’environnement un peu hostile nous pousse à davantage d’exigence.
J’ai par ailleurs une liberté dans le choix des sujets que n’a pas forcément une chaîne liée à la hiérarchie ecclésiale. A “Direct 8”, il n’y a pas de tabou. En revanche, si un jour on me demandait d’être racoleur pour faire de l’audience, j’arrêterais !
Cette expérience nourrit-elle votre foi ?
Complètement ! En trois ans, j’ai beaucoup progressé dans la foi. D’abord, parce que je fais des rencontres incroyables, je découvre des lieux, des communautés, des œuvres d’art… mais, aussi car je suis amené à beaucoup lire. La Bible, les encycliques ou les déclarations du Pape. Et plus je lis, plus je crois ! Plus je prends conscience de l’universalité du message de l’Eglise et de son actualité.
Quelle est votre plus belle rencontre ?
Sur plus de 200 émissions, il y a eu beaucoup de beaux moments… Mais je dirai que faire venir un moine sur le plateau, c’est la garantie d’un moment particulièrement fort. Ils apportent avec eux leur sérénité, leur rectitude. Je suis épaté par les moines.
Pour la Saint-Valentin, un mot sur votre femme… rencontrée elle-aussi sur le plateau de votre émission ?
Elle aussi m’épate ! Je suis édifié par sa foi à déplacer les montagnes.
Questionnaire de saint Antoine
Connaissez-vous saint Antoine de Padoue ? Quelle image avez-vous de lui ?
J’ai l’image d’un saint qui nous regarde de là-haut en souriant. C’est un souvenir d’enfant : je revois une statue avec des lys dans la main et un air confiant, paternaliste dans le bon sens du terme.
Etes-vous déjà allé à Padoue ?
Non, je ne connais pas Padoue. En revanche, il y a un lieu que j’aime bien : c’est la chapelle de la Médaille Miraculeuse, à Paris. J’y ai des souvenirs très forts de confessions. J’aime aller m’y recueillir quand j’ai un moment.
Quand vous sentez-vous le plus proche de Dieu ?
En face de choses qui me dépassent, telles que la mer ou la montagne. Je pense que je suis contemplatif. Ce contact avec l’immensité de la création fait ressurgir en moi de vieux sentiments religieux, comme la crainte de Dieu ou le sentiment de ma petitesse. Cela élève l’âme de contempler la création…
Comment priez-vous ?
N’importe comment ! Aussi bien sur mon scooter, qu’à cheval, dans un ascenseur, dans mon lit ou dans une chapelle. J’aime m’adresser à la Vierge Marie, je me confie à elle tous les jours.
Qu’est-ce qui vous rendu le plus heureux cette année ?
Mon mariage, le 28 juin dernier. J’ai rencontré ma femme sur la chaîne “Direct 8”. Nous présentions l’émission Dieu merci ! ensemble. Elle m’a étonné par son exigence. Avec elle, il n’y a pas de concession, que ce soit dans le travail ou dans la foi…