Paul, libre pour l'Eglise
LA PAROLE DE DIEU
Qui a lâché l’onagre en liberté
et ses liens, qui les a dénoués ?
A celui à qui j’ai donné le désert pour maison
et pour demeure la terre salée.
Il méprise la multitude de la ville
et n’entend pas les vociférations de l’ânier.
Il explore les monts de son pâturage
et recherche toute sorte de verdure
(Jb 39, 5-8).
LA PAROLE DE SAINT ANTOINE
Paul, onagre en liberté. L’onagre désigne saint Paul qui fut comme un âne laboureur dans le champ de l’Eglise.
Le champ est appelé en latin ager, lieu où l’on fait quelque chose. En effet, dans un champ on sème, on plante des arbres, on aménage des pâturages, on l’embellit de fleurs. Dans le champ de la sainte Eglise, saint Paul a semé la parole de Dieu, a greffé la vie sainte qui produit les saints, a aménagé les pâturages de la vie éternelle, l’a embellie des fleurs des vertus. Il fut un âne de ce champ, comme il le dit lui-même, « par les labeurs, par les emprisonnements, par des plaies hors mesure, souvent par des périls de mort (2 Co 11, 23) ; sans parler de mon obsession de chaque jour, le souci de toutes les Eglises ! » (2 Co 11, 28).
Il a été lâché en liberté par le Christ qui le rendit libre dans la conversion, afin qu’il s’en allât prêcher partout la parole ; et par sa passion, il l’a délié de son corps, pour qu’il s’envole au ciel.
Il a mépris la multitude de la ville de Rome où on lui a coupé la tête : « Pour l’Evangile, j’ai été établi, moi, prédicateur, apôtre et docteur des nations. C’est pour cette raison que j’endure ces souffrances, mais je n’ai pas honte » (2 Tm 1, 11-12).
Il a exploré les pâturages et recherché toute sorte de verdure. Dans sa chair mortelle, il explora avec assiduité les pâturages célestes, dans la contemplation ; et à présent, il recherche le bonheur du rassasiement éternel qui satisfait tous désirs.
POUR ALLER PLUS LOIN
Ce passage, extrait de la fête des saints Pierre et Paul, commente une citation de Job et vient à point pour célébrer la conversion de Paul et sa mission dans l’Eglise.
Dans les Sermons, l’âne est le symbole de la paresse ; ici, l’image évoque l’âne du champ (étymologie du mot “onagre”), un animal habitué au travail, à la fatigue, donc tout à fait pertinent pour évoquer la figure de saint Paul, le travail par lequel il a cultivé le champ de l’Eglise, prêché l’Evangile, organisé les premières communautés, au milieu des labeurs et des souffrances, et par son témoignage en faveur du Christ jusqu’au martyre.
De saint Paul, Antoine souligne l’entière liberté, depuis sa conversion, vis-à-vis des lois et traditions juives, au service du Christ pour prêcher librement sa parole. Il fut également libre vis-à-vis des foules romaines dont il a méprisé les protestations ; et de Néron, dont il n’a pas craint le glaive qui l’a libéré de son corps, car, comme il l’écrit lui-même aux Romains, « nulle créature n’a pu le séparer de l’amour du Christ ».
Serviteur libre, Paul a aussi recherché les bons pâturages de la vie éternelle. Elevé au ciel dans la contemplation, il a pu goûter de choses merveilleuses, indicibles en langage humain.
Car, conclut Antoine, la beauté de la majesté divine est tellement grande qu’elle enflamme de désir ceux qui la cherchent ; en les enflammant, elle les restaure, en les restaurant, elle augmente encore leur désir.
Qu’il en soit aussi ainsi pour nous tous.