Noël, “Lieu théologique” ?
Je lis cette expression, p. 8 de ce numéro, à propos de la liturgie. De quoi s’agit-il ? D’un jargon théologique, réservé aux spécialistes ? De la place qu’occupe, la liturgie précisément, dans notre vie, comme elle le fut pour saint Antoine ? Je le crois ! Et voici pourquoi.
On appelle “lieux théologiques” les paroles et les événements qui fondent notre foi, comme la sainte Ecriture, la vie du Christ, l’enseignement des apôtres ; ou ce qui fait la vie de l’Eglise : enseignements des Pères, des théologiens, des conciles, des papes, et… la liturgie. En célébrant l’Eucharistie, les fêtes et autres pratiques de dévotion, les fidèles expriment ce en quoi ils croient, selon le vieil adage : lex orandi, lex credendi ; et ceux qui élaborent la théologie ou les catéchismes doivent en faire grand compte.
Ceci explique pourquoi les chrétiens - mais cela est vrai aussi pour les fidèles d’autres religions -, restent attachés aux expressions de la prière liturgique, la messe par exemple ; qu’en y mettant sa foi et son cœur, on peut donner aux fêtes et à la prière une valeur encore plus grande. Saint Antoine nous en a donné l’exemple en nous laissant des sermons pour tous les dimanches de l’année… Mais cela explique également que la liturgie n’est pas immuable : expression de la prière vivante, elle assume des formes différentes ; elle n’est pas le lieu unique de la foi : celle-ci se fonde avant tout sur la parole de Jésus et la pratique des Apôtres ; elle ne doit pas servir de prétexte, de tremplin, pour défendre d’autres causes moins nobles - une idée, un courant politique, un mouvement de contestation -, qui n’ont rien à voir avec la foi et la prière.
J’écris ceci parce que le sujet est d’actualité, mais aussi parce que cela s’applique à Noël, la fête traditionnelle la plus chère aux chrétiens. Quelle peine, en effet, pour les chrétiens de Bethléem de vivre des Noëls de guerre ; ou pour des soldats envoyés dans des pays non chrétiens, d’être empêchés de célébrer Noël !… Or, le Noël chrétien peut être entièrement éclipsé chez nous par l’ambiance païenne des vitrines, des restaurants, des souhaits, des cadeaux… Il peut être valorisé, au contraire, par notre manière croyante de célébrer la Nativité, et de réfléchir sur le Christ, enfant aimant, pacifique, pauvre, démuni…
Les fêtes chrétiennes sont un héritage précieux, un des lieux de notre foi ; un lieu que nous contribuons à rendre plus riche et plus précieux, par l’intensité de notre propre foi et par la ferveur avec lesquelles nous les célébrons.
Un Joyeux Noël est alors un Noël débordant de la foi et de la joie intérieure qui ont rempli le cœur de Marie, de Joseph et des bergers.