N’ayons pas peur de nous approcher des saints !
Pour être canonisé, que demande l’Église ?
Il y a trois types de sainteté : les vertus héroïques, le martyre (mort en haine de la foi) et l’offrande de la vie. Cette troisième dimension a été instaurée par le pape François pour distinguer le martyre du témoignage d’une personne qui donne sa vie en manifestant une charité extraordinaire. Pour objectiver le critère des vertus héroïques, on regarde tous les aspects de sa vie pour voir si elle correspond à l’Évangile. Cette conformité lumineuse à l’Évangile est un don de l’Esprit. Ensuite, nous regardons la réputation de sainteté. Cela signifie que cette personne est connue, aimée, priée, comme modèle et intercesseur. La réputation de sainteté doit exister du vivant de la personne, au moment de sa mort et après la mort. On regarde comment elle se maintient et se développe avec le temps : comment les gens l’aiment, l’écoutent, la prient et obtiennent des faveurs. Parmi ces faveurs, l’Église demande qu’il y ait un miracle. Il s’agit habituellement d’une guérison.
Quels sont les critères d’une guérison ?
Une guérison miraculeuse est un signe que l’Église demande à Dieu pour être confortée dans sa conviction que la personne est sainte : elle doit être rapide, complète, définitive et inexpliquée selon les connaissances actuelles de la science. Quand le Seigneur donne ce signe, l’Église opère la béatification. Cette célébration, concédée par le pape, est limitée au niveau du diocèse ou de la famille spirituelle du serviteur de Dieu. Cela signifie qu’on peut le prier publiquement, mais de manière limitée. L’Église demande un deuxième signe (un deuxième miracle) au Seigneur pour que ce culte soit étendu à toute l’Église. La canonisation est célébrée de manière solennelle à Rome par le pape qui utilise la formule de la proclamation de la foi. C’est une assurance que la personne est au ciel et qu’on peut la prier dans le monde entier.
Pourquoi l’Église demande-t-elle un miracle ?
Chez les saints, les miracles sont la preuve qu’ils participent de la bonté de Dieu qui est proche des hommes, de leurs souffrances. Pendant sa vie publique, Jésus a fait de nombreux miracles pour que les gens découvrent qu’il est envoyé par le Père des Miséricordes. Une guérison est la chose la plus observable. Une inondation ou un feu qui s’arrêtent d’un coup sont aussi des miracles.
Un saint donne-t-il toujours sa vie ?
Le propre du saint est le don de soi. La caractéristique de la sainteté est cet absolu de l’amour de Dieu et des autres, qui a envahi sa personne et rayonne à travers elle. C’est pour cela qu’on représente les saints avec une auréole. Mère Teresa avait un rayonnement et une beauté spirituelle forte ; de son visage transparaissait une lumière. Un saint participe pleinement à la bonté et à la miséricorde de Dieu.
Pourquoi a-t-on besoin de modèles alors que nous avons le Christ ?
C’est le propre de la famille, c’est la communion des saints ! On ne peut séparer le Christ et son Église, son corps mystique. On peut tous trouver un frère ou une sœur au Ciel avec qui on se sent proche et qui nous aide à marcher vers Jésus.
Pourquoi des causes restent-elles 400 ans dans les placards et d’autres avancent en 5 ans ?
Il y a là un grand mystère de la volonté divine, puis les aléas de l’histoire. Mener à bien une cause est un très grand travail ; c’est pour cela qu’il y a si peu de laïcs ou de prêtres diocésains parmi les saints. Ce qui me frappe, c’est la grande prudence de l’Église. La procédure est longue et rigoureuse, si bien qu’à la fin, après avoir passé tant d’étapes, le pape peut être convaincu et dire au peuple de Dieu : il n’y a pas de doute, cette personne a vécu l’Évangile.
Quels modèles de vie chrétienne voulons-nous donner aujourd’hui ?
La Congrégation est attentive aux dossiers de prêtres diocésains et de laïcs, surtout jeunes, qui lui arrivent. Regardez le tout jeune Carlo Acutis, laïc féru d’informatique : il est béatifié ce mois-ci à Assise. La Congrégation pour les causes des saints ne se limite pas à recevoir les dossiers pour les traiter, elle regarde ceux qui permettent à l’Église de donner le témoignage dont le monde a besoin aujourd’hui.
Prier un saint ou prier avec un saint ?
Les deux ! C’est comme dans une famille : on ne parle pas qu’au papa ! On s’adresse aussi à ses frères et sœurs et on ne leur demande pas les mêmes choses. Dans l’Église, c’est pareil, on s’adresse aux saints, on leur dit qu’on les aime et, comme ils sont puissants dans le cœur de Dieu, on leur demande de venir nous aider, nous exaucer. Vivre avec les saints, c’est la simplicité de la vie de famille. Quand on s’adresse à un saint, on sait très bien que sa puissance ne vient pas de lui mais de Dieu.
Comment le père Marie-Eugène s’est-il embarqué dans l’aventure de la sainteté ?
Le bienheureux père Marie-Eugène a été saisi par l’Esprit et il a répondu oui ! Ce carme est un maître de vie spirituelle, d’oraison. Il nous montre comment vivre la petite voie de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Aujourd’hui, sa réputation de sainteté est déjà universelle. On attend juste le deuxième miracle pour qu’il soit canonisé.
Peut-on déjà percevoir des traces de sainteté du vivant d’une personne ?
Oui ! J’ai connu un prêtre saint dont j’admirais la simplicité, la charité absolue, le don de soi total et l’humilité. Il y a 11 vertus et il ne peut y en avoir une qui soit héroïque sans les autres. S’il en manque une, les autres ne sont pas authentiques. Ce sont des manifestations de la grâce qui est nécessairement unifiée. Vous ne pouvez pas avoir la charité sans la foi, la prudence sans l’humilité, la charité sans l’humilité, etc. Quand la sainteté est réalisée, les vertus sont toutes là !
Pourquoi est-ce si dur de se laisser aimer ?
Devenir saint, c’est se laisser aimer par Jésus ! Dieu veut tout nous donner mais nous avons au fond du cœur un réflexe de peur et d’indépendance qui nous retient de nous abandonner entre ses mains. La sainteté consiste à faire toujours plus confiance à son amour paternel.
Vous qui fréquentez particulièrement un saint, comment le devenir ?
En s’imprégnant de la Parole de Dieu. L’Évangile est accessible à tous ! Il ne faut pas avoir de complexes : on peut tous le lire, tel que l’on est. Puis, il faut se donner chaque jour et mettre de l’amour dans ce que l’on fait, avoir aussi recours aux sacrements qui sont une aide puissante. En lisant les biographies de saints, on se met à les aimer et on a envie de faire comme eux. Ils sont de vraies lumières qui nous montrent l’amour de Jésus.