L’insoutenable légèreté de l’amour
Peu de mots sont utilisés, voire même déformés, comme le mot « amour », par lequel on peut dire tout et son contraire. Ainsi, lorsqu’on parle d’« amour », on finit souvent par le comprendre de manière générique et abstraite.
Saint Antoine associe l’amour à deux qualités attrayantes et sensibles, qui nous aident à le ressentir avec davantage de précision et de force. Il affirme que l’amour est capable de générer de la douceur et de la légèreté, deux « ingrédients » qui attirent facilement notre sympathie.
Nous sommes tous fascinés par la douceur, et cela est peut-être dû aux « vibrations » plus dures qui nous entourent et qui peuvent naître en nous. Tantôt, nous arrivons à la fin de la journée avec un cœur un peu amer et nous ne savons pas pourquoi. Nous avons peut-être réussi à faire tout ce que nous avions en tête ; matériellement, tout s’est passé comme prévu. Bref, les choses « importantes » se sont bien passées.
Alors comment expliquer l’amertume que nous ressentons en nous ? Peut-être avons-nous peu regardé, peut-être avons-nous peu écouté, peut-être avons-nous peu respiré. Nous avons beaucoup fait, mais peu goûté. Oui, car la douceur est pour ceux qui savent goûter.
Ainsi, ce dont nous rêvons tous – terminer notre journée avec une douceur joyeuse dans nos cœurs – peut se réaliser si nous ralentissons le rythme de nos journées. En offrant des regards reposants, capables de faire habiter l’autre dans les espaces de l’âme ; en écoutant la voix de ceux qui veulent partager, raconter, se confier ; en respirant les mille parfums de la vie qui nous touchent simplement : les mains tendues d’un enfant, une lettre que nous recevons...
La douceur n’est possible que si l’on prête attention aux détails « légers ». Parce que l’amour peut apporter de la légèreté, et nous en avons tous besoin ! C’est peut-être l’une des « magies » les plus efficaces que l’Évangile de Jésus peut générer : tout ce qui concerne le Seigneur, ses paroles et ses gestes, allège nos fardeaux.
Saint Antoine le savait bien : si, au nom de l’Évangile, nous nous retrouvons plus chargés et emprisonnés, alors ce n’est pas du tout l’Évangile que nous cherchons et vivons, mais nos propres complications. Et l’amour apporte de la légèreté parce qu’il n’oblige personne à faire tout comme il faut, tout le temps ; parce qu’il donne toujours à chacun la possibilité de recommencer. La peur et l’indifférence, au contraire, engendrent l’amertume et la lourdeur ; elles rendent « insupportable » même ce qui, en soi, ne le serait pas du tout.
Dieu lui-même est léger et doux : sa grâce répare et fait entendre « le bruit de la brise légère, la douceur de Dieu Père » (Sermon pour le IIe dimanche de Carême).