« L’Esprit poussa Jésus au désert » (Mc 1, 12)
Par ces paroles, Antoine de Padoue commence le long sermon du premier dimanche de Carême, sur la pénitence, avec les trois étapes de la contrition, de la confession et de la satisfaction, qui mènent à la conversion. Pour les hébreux, le désert évoquait le temps des fiançailles avec Dieu annoncé par les prophètes, mais rappelait aussi la longue période des quarante années de continuelles récriminations contre Dieu en raison du manque de pain, d’eau, et la privation d’une présence tangible du Seigneur. Jésus est présenté par les évangélistes comme un homme libre, comme le véritable Israël qui aime Dieu de toute son âme, de tout son cœur et de toutes ses forces. Il est, d’après frère Antoine, le nouvel Adam qui ne cède pas à la tentation du serpent. C’est aussi notre tentation que d’obtenir satisfaction de tout : même les pierres doivent se changer en pain. C’est une manière de vivre enfantine. Notons qu’« âme » se dit nefesh en hébreux, et signifie aussi « gourmandise ». L’homme, le chrétien adulte, perçoit qu’il a une mission à accomplir : une parole écrite par Dieu dans son cœur.
L’antique Adam croyait pouvoir devenir comme Dieu, et le peuple d’Israël récriminait en pensant connaître le chemin vers la Terre Promise mieux que Dieu. C’est aussi notre tentation : nous souhaitons un succès immédiat et voulons que les choses avancent de manière efficace. Nous ne voulons pas accepter la frustration. Nous ne voulons pas attendre les temps de Dieu. C’est la tentation que Satan inflige au Christ lorsqu’il l’emmène en haut du Temple : obtenir du succès, tout de suite. Mais Jésus, librement, sait attendre les temps fixés par le Père : il aime Dieu de tout son cœur.
La troisième tentation est celle de devenir maître du monde, moyennant le pouvoir de l’argent. Israël se construit une idole d’or et la sert. La possession exproprie : on croit devenir maître, alors qu’on devient esclave. Le nouvel Israël, Jésus, nous indique le chemin de la liberté : « Adore le Seigneur ton Dieu ».