Les sandales de l’Évangile
« Jésus appela les Douze et les envoya en mission deux par deux » (Mc 6,7). Comme les apôtres, chaque chrétien a reçu une mission, née de sa relation avec Jésus qui « appelle » ses disciples. Il les envoie libérer celui qui est enchaîné par le pouvoir du Malin. Pour réussir cette tâche, il faut pouvoir marcher dégagé de tout poids. Pour avancer rapidement, tu ne dois avoir rien à défendre : ni pain, ni besace, ni argent, ni de tunique de rechange. Nous ne pouvons pas évangéliser si nous ne sommes pas irréprochables, car plus nous possédons, plus nous avons de choses à défendre. Pour le pain, nous faisons la guerre. Si notre besace est pleine, nous devons la protéger des voleurs. Si nous gardons de l’argent attaché à notre ceinture, nous avons peur de le perdre. Pour marcher libres, nous n’avons besoin que du bâton et des sandales : le bâton pour nous appuyer sur des sentiers escarpés et annoncer l’Évangile avec autorité ; les sandales, afin que, comme le dit saint Antoine, « le pied ne soit ni entièrement couvert ni nu sur le terrain, pour que l’Évangile ne reste occulté ni ne s’appuie sur des privilèges terrestres » (16e dimanche après la Pentecôte).
Frère Antoine, en 1220, après sa rencontre avec les premiers martyrs franciscains, quitte la sécurité du monastère, va vivre sans appui, si ce n’est le bon vouloir de Dieu. Il ne veut pas rester installé, mais chausse les sandales et se met en chemin avec les disciples de François, sur les routes du monde, vêtu d’une seule tunique, avec, en sa main, le bâton courbé de la Parole de Dieu. Il veut stimuler les chrétiens tièdes et ramener au bercail les brebis du troupeau de Dieu, dévoyées par l’hérésie du tentateur.
L’unique vêtement que Jésus prescrit à l’évangélisateur et saint François à ses frères renferme une signification symbolique profonde. Le message du chrétien n’est pas ambigu. Le chrétien ne change pas de veste en changeant d’auditeurs ; il est cohérent avec l’Évangile. Il risque la mort, sûr qu’elle est la porte du ciel.