Le père Svanera : Saint Antoine, grand Intercesseur
Que représente le saint pour notre vie quotidienne ?
Je dirais avant tout que le saint est vu comme celui qui a rejoint ce qu’on appelle le paradis, c’est-à-dire la pleine communion avec Dieu. Dans un certain sens, les saints sont donc des témoins qui nous ont précédés dans le monde de Dieu. Ainsi, nous les considérons comme « saints » : nous reconnaissons leurs qualités, l’exemplarité de leur vie et leur expérience. Par leur chemin, ils ont incarné l’Évangile et ils ont su en vivre les valeurs. Pour nous, ils sont devenus un exemple et nous pouvons contempler leur vie ou encore les écrits qu’ils nous ont laissés. Dès lors, les saints sont pour nous des personnes toutes proches de Dieu. Ils peuvent Le contempler et Le louer sans arrêt.
Les saints sont aussi des intercesseurs…
Étant les plus proches de Dieu, ce sont aussi eux qui peuvent intercéder auprès de Lui pour chacun de nous. Comme peuvent le ressentir les fidèles de saint Antoine, le « service » que rendent les saints aux dévots – à ceux qui les prient – est justement celui d’écouter, de se faire messagers des invocations qui sont adressées à Jésus par leur biais. Le Christ est l’intercesseur par excellence, le médiateur de toute grâce, de chaque requête que nous faisons par le saint. La prière d’intercession est donc une prière qui éduque le chrétien à voir aussi au-delà de lui-même. Regarder les autres, penser aux autres, prendre soin d’eux. Elle est donc une prière de foi, de demande, mais aussi une grande prière d’amour, de témoignage et de proximité avec son prochain.
Comment expliquez-vous la dévotion populaire toujours aussi forte pour certains saints, comme saint Antoine de Padoue ?
De manière générale, la dévotion populaire met en jeu toute la personne, toute l’humanité, c’est-à-dire la dimension de la foi qui est affective, pas seulement cognitive, qui est physique. La dévotion populaire est l’expérience du contact, comme la dévotion mariale ou antonienne. Elle met toute la personne en relation avec la foi. La dévotion envers un saint, tout comme la dévotion envers le Sainte Vierge, renvoient à l’Évangile. Si l’on regarde bien l’Évangile, on s’aperçoit que les personnes qui rencontrent Jésus ont un besoin physique, affectif, émotif, et certainement aussi cognitif.
Au sanctuaire de Padoue, à quoi ressemble cette dévotion ?
Le pèlerin a besoin de toucher, d’écouter, de voir. Il a soif d’une connaissance de la foi exprimée à partir d’épisodes, d’évènements, d’anecdotes du sanctuaire et de l’évènement religieux. En ce qui concerne saint Antoine, il est un grand intercesseur. Il a fait des miracles de son vivant, comme le racontent les chroniques. Il est à ce titre appelé « le saint des miracles » ici à la Basilique. À en croire les fidèles, cette intercession continue aujourd’hui encore. On entend régulièrement des témoignages : « saint Antoine a fait ceci », « il y a encore eu un miracle dans ma famille », « j’ai prié saint Antoine et il m’est arrivé telle chose », etc.
Dans le monde d’aujourd’hui, dans notre vie quotidienne, que nous disent les saints ?
Je resterais sur la figure de saint Antoine, mais on peut étendre à d’autres saints. Cette image de saint Antoine sur le noyer. Le saint est capable de nous dire que notre vie est ici, mais que nous avons besoin de regarder au-delà du monde, du matériel, de la réalité. C’est précisément l’histoire de Zachée.
Il faut avoir une curiosité, un émerveillement, une volonté de recherche qui élève notre esprit et ne le réduise pas à la dimension profane, mondaine. D’autre part, le saint nous dit que Dieu est présent.
En quoi saint Antoine, comme tant d’autres saints, est-il moderne ?
Saint Antoine n’est pas seulement le saint sur le noyer, il est un grand promoteur de la justice, un grand défenseur des droits. Il est d’une grande modernité car il parle d’égalité, de respect, de dignité, de fraternité et de liberté.
Comme tant d’autres saints, Antoine est un personnage qui s’est dépensé dans la défense des humbles, des pauvres et de ceux qui sont oppressés. La modernité d’un saint comme lui va donc bien au-delà d’une dévotion désincarnée. En réalité, celui qui écoute le saint se fait provoquer par des évènements, par une parole. Celle de saint Antoine était celle de la dénonciation de l’usure, de l’immoralité, de la dissolution du clergé et de la soif de pouvoir. Et tout cela a une résonnance très contemporaine.
Le pape François a dit que la communion des saints est l’une des réalités les plus consolantes de la foi. Comment comprenez-vous ces paroles ?
Parler de communion des saints signifie avant tout parler du Ciel. Cela signifie regarder avec espérance l’avenir, avoir un regard qui ne soit pas uniquement « terrestre ». Il est donc consolant de voir les saints comme ceux qui nous ont précédés, qui nous attendent aux côtés des personnes qui nous sont chères. Ce n’est pas un hasard si la fête des saints est aussi proche de celle des défunts. Le saint devient en quelque sorte notre guide, qui accompagne notre pèlerinage et nous mène vers le Royaume des Cieux. C’est donc une grande consolation de savoir que nous sommes accompagnés, malgré les épreuves et les souffrances, vers Jésus, vers Sa gloire et Sa résurrection.