La Basilique à l’UNESCO
C’est au cœur de l’été que nous est arrivée la nouvelle tant attendue : l’inscription de Padoue sur la liste des sites UNESCO en tant qu’Urbs picta, qui signifie « ville peinte ».
Cette reconnaissance met à l’honneur huit cycles de fresques remontant au XIVe siècle, présents notamment à la basilique et au couvent Saint-Antoine où sont conservés les premiers témoignages de la présence de Giotto à Padoue.
Appelé dans la cité antonienne par des frères franciscains qui l’avaient vu décorer la basilique d’Assise, c’est bien dans la basilique Saint-Antoine que Giotto, le célèbre artiste florentin, commence à jeter les bases de sa recherche sur la perspective et le rendu de l’espace. Des traces de ses fresques sont encore conservées dans la Chapelle de la Vierge Noire (la Madonna Mora), sous l’arcade d’entrée de la Chapelle des Bénédictions et dans la Salle Capitulaire.
Entre 1302 et 1305, l’artiste atteint la pleine maturité de son art dans la fameuse chapelle de la famille Scrovegni. La narration des vies de la Vierge Marie et de Jésus Christ trouve son apogée dans la vision apocalyptique du Jugement dernier. Le visiteur est immergé dans un nouvel espace, au cœur d’une représentation intime des sentiments et des émotions humaines.
Ce regard nouveau qu’offre la Renaissance devient une source d’inspiration, non seulement pour les artistes de son temps, mais aussi pour les notables de Padoue qui commencent à faire appel à eux pour décorer leurs édifices religieux et séculiers.
Comme le souligne l’UNESCO, les œuvres ont été créées pour différents types de clients, dans des bâtiments aux fonctions diverses, et conservent une unité de style et de contenu.
Dans l’église des Érémitiques, les histoires des saints Philippe, Jacques et Augustin sont illustrées par Guariento di Arpo. Dans le baptistère de la cathédrale, Giusto de Menabuoi introduit des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament ainsi qu’un magnifique Christ bénissant, placé au centre de la coupole représentant le Paradis peuplé de centaines d’anges dont la finesse est touchante. Les fresques de l’immense Palais de la Raison abordent les thèmes de la justice divine et de la justice terrestre, tandis que la Chapelle du Palais des Carraresi et l’oratoire Saint-Michel mêlent les récits évangéliques à des épisodes de la vie quotidienne ou de l’élite padouane du XIVe siècle.
L’évolution de l’art au cœur de la basilique
Au cours de ce même siècle, la Basilique continue, elle aussi, à faire appel à de nombreux artistes inspirés par l’art giottesque, dont les œuvres sont désormais reconnues par l’UNESCO. Parmi eux, Giusto de Menabuoi qui décore la splendide Chapelle du bienheureux Luca Belludi, ou Jacopo Avanzi et Altichiero da Zevio, les auteurs des fresques de la Chapelle Saint-Jacques, située face au tombeau de saint Antoine. Le même Altichiero, aidé de son frère, offre une autre « petite chapelle des Scrovegni » en recouvrant entièrement l’oratoire Saint-Georges selon le style de Giotto.
Pour l’UNESCO, les huit cycles de fresques « illustrent une manière totalement nouvelle de représenter la narration en peinture. […] Ces innovations marquent une nouvelle ère dans l’histoire de l’art, produisant un changement de direction irréversible ».
Une inspiration artistiquenet spirituelle
Lorsqu’il était le Recteur de la basilique Saint-Antoine, le père Oliviero Svanera a beaucoup œuvré pour la préparation de la candidature UNESCO. Il voit dans cette reconnaissance, non seulement une invitation à continuer de préserver et de diffuser un patrimoine artistique unique au monde, mais aussi « une occasion pour nous, l’Église, de renouveler notre proposition de rencontre avec la foi qui a donné naissance à ces œuvres. À travers les fresques de la Basilique […] nous voulons faire ressortir […] la possibilité d’une rencontre avec Celui qui est signifié dans ces œuvres, le Christ Sauveur. C’est le chemin de l’Évangile, de l’évangélisation par la voie de la beauté dont parle le pape François dans l’exhortation apostolique Evangelii gaudium. Le chemin de la beauté qui, à partir de l’expérience de la rencontre avec la beauté de l’art qui suscite l’émerveillement, peut ouvrir la voie à la recherche de Dieu et disposer le cœur et l’esprit à la rencontre avec le Christ, Beauté Incarnée offerte par Dieu aux hommes pour leur Salut ».
On peut y voir une invitation à une rencontre au cœur de sa foi qui débuterait par un beau voyage à Padoue ! ■