Jeûne et cendres
LA PAROLE DE DIEU
Quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu
comme ceux qui se donnent en spectacle ;
ils se composent une mine défaite
pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent.
Amen, je vous le déclare : ils ont touché leur récompense.
Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ;
ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes,
mais seulement de ton Père
qui est présent dans le secret ;
ton Père voit ce que tu fais en secret : il te le rendra. (Mt 6, 16-18)
LA PAROLE DE SAINT ANTOINE
Quand vous jeûnez, ne prenez pas un air triste comme les hypocrites. L’hypocrite est humble d’aspect, négligé dans l’habillement, grêle dans la voix, mais loup dans son esprit. Une telle tristesse n’est pas selon Dieu. Ils se défigurent le visage, afin de paraître aux yeux des hommes… Tout ce qu’ils font, c’est de l’apparence, une fausse couleur. … qu’ils jeûnent. L’hypocrite jeûne pour en recevoir louanges ; l’avare, pour remplir sa bourse ; le juste, pour plaire à Dieu. Mais toi, quand tu jeûnes, parfume ta tête… Nombreux sont ceux qui jeûnent pendant ce Carême, et cependant persévèrent dans leurs péchés. Ceux-ci ne parfument pas leur tête. Toi, donc, orgueilleux, ramène devant ton esprit ton incinération… Où sera alors l’orgueil de ton cœur ? POUR ALLER PLUS LOIN Dans les sermons pour les fêtes de l’année, Antoine commente habituellement verset par verset l’évangile du jour. Ainsi, le Mercredi des Cendres, c’est le texte de Matthieu 6, sur le jeûne et l’aumône qui est proposé à notre méditation.
Toi, avare, souviens-toi du dernier jugement où il y aura un juge en colère, une conscience qui te ronge.
Et toi, luxurieux, rappelle-toi la géhenne inextinguible, où il y a une mort sans mort, une fin sans fin…
Lave ton visage. Porte le regard sur le miroir de ta conscience et si tu y rencontres la tache de quelque péché, approche-toi aussitôt de la source de la confession.
Afin de ne pas laisser voir aux hommes que tu jeûnes. Jeûne pour les hommes celui qui cherche leur louange ; jeûne pour Dieu qui se mortifie par amour pour lui et élargit aux pauvres ce qu’il soustrait à lui-même.
Le regard d’Antoine rencontre d’emblée celui du Christ : les pratiques religieuses, dit-il, n’ont pas pour but de soigner notre image, d’attirer l’attention des hommes pour en recueillir approbation et consensus… Elles atteignent leur but si elles purifient le cœur ; si elles nous approchent de Dieu en esprit et en vérité. Les images de l’hypocrite et de l’avare, toutes en fausseté et négation, montrent donc bien ce qui est à éviter.
Par opposition à ce regard négatif, le regard positif se pose alors sur la pratique du jeûne : celui-ci est vrai s’il s’accompagne d’une conversion sincère et d’une réflexion sérieuse sur sa propre vie. La conversion est sincère si elle change notre vie. Réfléchir signifie aller au sens de la vie : si l’on est orgueilleux, penser que nous ne sommes que poussière, cendre. Si l’on est avare, se souvenir du mal que l’on fait. Si on est sensuel, regarder au-delà du plaisir passager.
Enfin, le geste de laver son visage évoque la femme au miroir : si elle découvre des taches sur son visage, elle les enlève aussitôt. De même, si le miroir de la conscience fait ressortir des taches de péchés, on doit les laver à la source de la confession.
Jeûne et cendres : deux chemins pour découvrir le sens de sa propre vie.