Heureux parents de prêtre

Dans quel contexte a grandi votre fils ? Quels furent ses premiers pas de séminariste et de prêtre ?
Nous avons cinq enfants et seize petits-enfants. Enfant, Étienne a été servant de messe et scout d’Europe. Un soir, lors d’une veillée scoute, il a été ébloui par la beauté du ciel et a alors pensé à la prêtrise.
Après ses études à HEC, Étienne, aventureux, organisait des safaris photos en Tanzanie. Là-bas, il a rencontré des missionnaires irlandais au contact des Masaï et cela l’a beaucoup marqué.
Puis, il a fait son service militaire dans les commandos de la marine, pendant 18 mois. À son retour, il est parti faire une retraite d’une semaine à Issy-les-Moulineaux. Il a suivi quatre fois ces retraites avant de nous annoncer son entrée au séminaire.
Après avoir visité plusieurs communautés, il est finalement entré aux Béatitudes. Envoyé en Nouvelle-Calédonie, il y fut ordonné diacre avant d’être ordonné prêtre à Lisieux en 2008. Il a aussitôt été envoyé en Côte d’Ivoire, au Liban, en Israël et dans ces deux derniers pays, il a préparé et passé successivement mastère et doctorat en théologie sur l’araméen.
Depuis son séjour en Israël, il travaille avec l’équipe des dominicains de l’École Biblique française de Jérusalem sur un projet pharaonique : BIBEST, la Bible en ses Traditions, sur Internet. Il travaille sur les sources grecques, hébraïques et araméennes. Arrivé à Callao, au Pérou, en septembre 2016, Étienne a poursuivi son travail avec BIBEST. Il donne des cours de grec aux séminaristes du Pérou et est entré dans une communauté des Béatitudes qui s’occupe de cinq paroisses.

Avez-vous été surpris de la décision de votre fils ? Votre entourage était-il étonné ?
Au départ, nous ne nous y attendions pas du tout. Cela ne nous a posé aucun problème et la communauté des Béatitudes nous a remerciés de ne pas lui avoir mis de bâtons dans les roues ! Nous sommes engagés dans l’Église et avons été longtemps au service des préparations au mariage. Nous souhaitons que nos enfants soient heureux dans leurs choix. On a toujours senti Étienne heureux là où il est. C’est une joie pour la famille de le voir bien dans cette voie.

Aviez-vous des religieux dans votre famille ?
Oui, deux grands-oncles Frères des écoles chrétiennes et un grand-cousin bénédictin. Nous avions aussi une grande-cousine vierge consacrée. Par ailleurs, Maman a prié toute sa vie pour avoir un fils prêtre. Or, elle n’a pas eu de garçons. Elle a aujourd’hui un petit-fils prêtre et une petite-fille religieuse.

Comment un père et une mère de prêtre vivent-ils l’ordination sacerdotale ?
C’est très émouvant ! Nous avons vu ce moment comme un accomplissement pour lui et aussi un début. Le jour de son ordination, le 10 août 2008, il était entouré de deux prêtres qui l’ont beaucoup soutenu : un franciscain suisse et le « berger » d’une maison des Béatitudes en Israël. Étienne était heureux de se sentir encouragé et accueilli dans l’Église. Lors de la messe d’ordination, nous avons nous-mêmes apporté le calice et la patène, avant que l’évêque ne les remette à Étienne. C’est un moment d’une grande émotion.

Comment avez-vous vécu la première messe de votre fils ?
Très intensément. Elle s’est tenue dans la chapelle du Carmel de Lisieux. Bien sûr, nous regoûtons à la joie de l’ordination et de sa première messe, mais maintenant nous accompagnons notre fils au présent, là où il est, et nous ne restons pas trop ancrés dans le passé. L’ordination a bien évidemment été un grand moment, mais ensuite cela continue ! On avance !

Si le Seigneur prépare le futur prêtre, prépare-t-il aussi les parents ?
Vraisemblablement, mais on ne s’en rend pas compte ! Nous étions heureux de le voir devenir prêtre car nous sentions que c’était ce dont il avait envie et c’est un projet magnifique. En devenant prêtre, Étienne est devenu beaucoup plus attentif !

Peut-on dire que la famille est le premier séminaire ?
Nous avons essayé de faire en sorte que nos enfants aient une éducation religieuse. Nous priions le soir en famille. Mais tout ne peut pas passer par les parents.
L’aumônier scout d’Étienne faisait le catéchisme et donnait aux enfants une formation religieuse très solide car il savait que ce qui était enseigné dans les écoles n’était pas suffisant. Après cette partie théorique, les scouts la mettaient en pratique ! Les scouts d’Europe ont clairement façonné Étienne.

Le « oui » d’un fils appelle-t-il aussi le « oui » des parents ?
Nous avons accepté de dire « oui » ! Mais en même temps, son « oui » était dans la continuité de ce que nous lui avions transmis et le confirme.

Le choix de votre fils entraîne-t-il toute la famille dans une nouvelle étape à la suite du Christ ?
Notre foi s’en trouve renforcée. Quand Étienne est avec nous, ce sont vraiment des temps forts que nous vivons avec lui. Ses homélies, très bibliques, sont particulièrement nourrissantes. Nous les enregistrons et les réécrivons pour mieux les regoûter. C’est un gros travail mais un vrai bonheur !

Aujourd’hui, votre fils vous aide-t-il dans votre cheminement spirituel ?
Oh oui, très certainement ! On sent qu’Étienne prie pour nous et nous porte. Nous nous sentons appuyés spirituellement.

Avez-vous eu l’impression que votre fils ne vous appartenait plus ?
Une éducation réussie laisse partir ses enfants ! Quand un enfant a grandi, il faut qu’il s’épanouisse et qu’il prenne son envol. Nos enfants, quand ils sont adultes, ne nous appartiennent plus. C’est paradoxalement Étienne qui nous appartient le plus, de façon différente. Mais c’est sûr que c’est frustrant de ne pas le voir davantage.

La communauté des Béatitudes est devenue pour votre fils sa famille. Est-ce aussi pour vous une famille élargie ?
Oui, la communauté des Béatitudes est devenue pour nous une famille ! Comme peut l’être la belle-famille d’un de ses enfants. On se connaît bien, on a des liens très amicaux avec certains ; ce sont comme des cousins proches.

Votre fils a-t-il une place à part ? Peut-on dire qu’il est un phare ou un catalyseur pour votre famille ?
On peut dire ça, même si nous ne le voyons pas beaucoup !
Étienne est très populaire chez ses neveux et a un filleul dans chaque fratrie. Il a baptisé la plus jeune de nos petits-enfants.

Y a-t-il un évènement qui a renforcé vos liens avec votre fils ?
Pour nos 50 ans de mariage, nous avons emmené tout le monde en pèlerinage en Israël, autour d’Étienne. Nous avions tous nos enfants et petits-enfants. Nous étions 25 pour retrouver le 26e… Étienne ! Il a été pour nous organisateur, guide,  prêtre et prédicateur ! Ce pèlerinage fut magnifique et tous en gardent un grand souvenir. n