Être là
« Même si je donne le sentiment d’avoir des convictions très fermes, j’ai suffisamment d’interrogations pour continuer à me demander si je suis sur le bon chemin. Ce qui m’aide probablement à ne pas trop me prendre pour un leader. » À
39 ans, Erwan Le Morhedec est pourtant l’un des blogueurs les plus connus du web catholique. Outre son blog, il s’exprime également sur les réseaux sociaux où plus de 4 500 personnes le suivent sur Facebook et près de 15 000 sur Twitter !
Lorsque l’aventure débute en 2005, au lendemain du référendum sur la constitution européenne, il y voit l’occasion de faire entendre sa voix. « C’était une façon complètement différente de faire de la politique, dans un vrai débat plus que dans le militantisme habituel de tractage, collage d’affiches et meeting. »
S’il ne fait pas état de ses convictions religieuses au départ, Erwan publie quasiment un article par jour à l’approche de la présidentielle de 2007, et ne peut les cacher. « J’avais commencé à manifester le fait que ma vision de la société était un peu inspirée de mes convictions religieuses, notamment dans un ou deux articles où c’était suffisamment clair pour qu’en 2008, à l’occasion de la venue du pape en France, La Croix me demande de participer à un blog collectif. »
Son blog va alors prendre un nouveau tournant. « La visite de Benoît XVI intervient en pleine crise financière. À ce moment-là, on se demande si le système bancaire va tenir. Et puis aux Invalides, l’Évangile du jour est le culte des idoles. L’Église disait : “Fuyez le culte des idoles” et le lendemain, Lehman Brothers, l’idole, s’effondrait. Et derrière j’ai trouvé les mesures prises par le monde politique attristantes. C’est là que l’on a parlé du travail dominical et de la légalisation des jeux d’argent sur Internet. La réponse apportée par l’Église à cette situation de crise économique me satisfaisait bien plus que celle du monde politique. Le blog marchait bien, j’ai décidé de le mettre au service de l’Église, de me laisser bousculer, modeler d’avantage par son discours. »
Un choix qui a des conséquences importantes, notamment dans les réactions à ses publications. « Je suis ouvert à la contradiction, elle m’a d’ailleurs conduit à creuser mes positions, à les approfondir. Je n’ai pas de problème sur le blog où les règles sont claires. C’est différent sur Facebook et sur Twitter. Je n’y poste d’ailleurs pas la même chose. Pour reprendre un peu les catégories de l’Église, Facebook c’est Ad Intra, et Tweeter Ad Extra. L’outil Facebook est par affinité, du coup 85 % de mes contacts sont catholiques et j’ai l’impression d’aller parler à des frères. Sur Tweeter c’est beaucoup plus large, on y suit des gens avec lesquels on est en désaccord complet. Certains me suivent par curiosité, d’autres pour me rentrer dedans. Je ne vais pas critiquer l’Église sur Tweeter alors que je le fais plus facilement sur Facebook. »
Erwan est d’ailleurs surpris, et satisfait, par la liberté laissée par l’Église : « Jamais elle n’est venue me dire qu’il serait bien que l’on se rencontre pour vérifier qui je suis, ce que je veux. Il y a un respect total de la liberté d’expression des laïcs. »
Une liberté qu’il va continuer d’exercer, fidèle à sa devise, une phrase de Jacques Maritain : « L’important n’est pas de réussir, ce qui ne dure jamais, mais d’avoir été là, ce qui est ineffaçable ».
Koztoujours
Créé le 1er juin 2005, le blog d’Erwan Le Morhedec compte depuis près de 1 500 billets (articles) publiés et pas moins de 65 000 commentaires d’internautes. Avec une moyenne de 2 000 visiteurs par jour, sa fréquentation annuelle s’élève à plus de 750 000 visites. Certaines publications peuvent être lues jusqu’à 12 000 fois dans la journée suivant le thème abordé. Blog d’opinion qui traite de politique, de société et de religion, Koztoujours a d’abord été alimenté de manière anonyme. Pour des raisons professionnelles principalement, Erwan travaillait dans un cabinet d’avocats et ne voulait pas indisposer ses patrons comme ses clients par ses opinions, mais aussi pour pouvoir s’exprimer sans avoir peur du ridicule. Au fil des années, il prend plus d’assurance et sort de l’anonymat en 2011. Une façon de prouver aussi à ses détracteurs qu’il assume totalement ses propos. Depuis, il intervient régulièrement dans les médias et lors de conférences ou de débats.
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