Baptisés en primaire
Plus nombreux chaque année, des enfants se présentent au catéchisme sans être baptisés. Certains le seront en CM1 ou CM2, entre 9 et 11 ans. Véronique Bonnevie, Directeur du Centre National de l'Enseignement Religieux nous a aidé à mieux saisir cette démarche. |
« C'est ma mère qui m'a inscrit au catéchisme. Elle voulait que j'y aille. Moi, je ne pouvais pas en avoir envie, puisque je ne savais pas comment c'était ! Mais après, tous les trois, papa, maman et moi, on a été d'accord pour que je sois baptisé. C'est normal : papa et maman sont croyants, et moi aussi ! » explique Arthur, 9 ans et demi, qui vient d'être baptisé à la fin de son CM1.
Comme lui, de plus en plus d'enfants arrivent au catéchisme en CE2 sans être baptisés. Un certain nombre participera à un cheminement catéchuménal qui les conduira en deux ou trois ans à recevoir les sacrements de l'initiation : baptême, eucharistie, et (parfois) confirmation.
De nombreux cas de figures La plupart des enfants sont amenés par leurs parents. Autrefois, pratiquement tous ces enfants-là auraient été baptisés dans les premiers mois de leur vie. Aujourd'hui, de plus en plus de parents chrétiens diffèrent leur décision pour des raisons multiples.
« Nous voulions que nos enfants soient conscients de leur baptême et qu'ils en soient partie prenante. Alors, nous avons décidé d'attendre. En faisant ce choix, nous nous engagions à leur faire connaître l'Evangile dès leur plus jeune âge », se rappellent Marc et Aline, chrétiens engagés. Mais quand l'un de leurs trois enfants a manifesté son refus du choix qu'ils souhaitaient pour lui, ils ont été très blessés ...
D'autres parents, religieusement moins convaincus, dans un esprit assez soixante-huitard ont voulu attendre que leur enfant choisisse librement et sont moins déroutés si toute la fratrie ne suit pas le même chemin.
Dans d'autres cas, ce sont des circonstances familiales pas simples, marquées souvent par le chômage, l'émigration, de multiples déménagements, qui ont rendu difficile de se faire des racines dans un lieu donné. Puis un jour la vie s'est stabilisée. Des questions financières peuvent aussi jouer : « On avait si peu d'argent, avoue Claire, mais on tenait à inviter toute la famille au baptême d'Axel, alors on a attendu ... »
Aujourd'hui, certains couples de parents non mariés – eux aussi pour des raisons très diverses – mettent beaucoup de temps à trouver le courage d'oser frapper à la porte de l'Eglise, redoutant d'être rejetés, en raison de leur situation.
Mais ce ne sont pas toujours les parents qui sont à l'initiative de cette venue d'enfants non baptisés au catéchisme. Quelques uns viennent, entraînés par des copains de classe. Plus qu'avant, les enfants savent être entraîneurs d'autres enfants. Bien entendu, à ces copains attirants doivent correspondre des familles consentantes.
L’accord des parents Pour l'inscription au catéchisme, l'autorisation de la famille ou de la personne responsable de l'enfant est nécessaire. Pour le baptême, l'exigence est plus grande encore. On ne baptise jamais un enfant sans l'accord explicite des deux parents. Parfois l'un ou l'autre oppose un refus. Cette situation se rencontre surtout en cas de rupture familiale. L'Eglise alors ajourne la célébration du sacrement, car il est très important de ne pas rajouter à la division. L'incompréhension et même la souffrance de l'enfant peuvent être grandes ! Un bon accompagnement est indispensable pour lui expliquer que plus tard, bien sûr, il pourra être baptisé quand la décision dépendra de lui.
« Pour cette année, nous n'avons qu'un seul enfant non baptisé dont la catéchèse n'aboutira pas au baptême pendant le primaire, explique Jeanine Cox, catéchiste. Sa maman, veuve, immigrée, hésite encore à autoriser son fils à s'engager dans la foi chrétienne. Elle vit dans un environnement social très marqué par sa culture d'origine. Son enfant, lui, a un grand désir d'être baptisé. Je suis convaincue que la catéchèse est une ouverture pour lui, et si son désir persiste, le moment du baptême finira bien par arriver... »
« Devenir chrétien, c'est toute une aventure que nous avons à mener ensemble », proclame, dès l'accueil des enfants, le rituel du baptême à l'âge scolaire.
Ensemble, c'est donc la pleine acceptation d'une démarche pour laquelle famille, enfant, paroisse se trouvent en accord. Celui-ci se met en place dès l'inscription au catéchisme. D'abord, en s'informant dès le départ pour savoir qui est baptisé et qui ne l'est pas. Ensuite, en cherchant, avec beaucoup de prudence, à connaître le désir des parents et celui de l'enfant. Enfin, en expliquant très clairement comment se déroule la préparation au baptême : l'aventure ne se mène pas en quelques mois. Elle implique une découverte, un mûrissement. Elle comporte des étapes, des passages obligés (voir encadré).
« C'est un cheminement très fort, témoigne Jeanine Cox, sur toute une année, après l'année de catéchèse du CE2. En CM1, les enfants qui préparent leur baptême se retrouvent, en plus, tous les quinze jours, avec des catéchistes formés à cet accompagnement. Ce temps est nécessaire, même si les enfants seraient désireux d'être baptisés tout de suite. »
Ensemble signifie aussi que l'on n'est ni ne devient chrétien tout seul. Aussi, tous les enfants vont-ils participer à des groupes de catéchèse mélangeant ceux qui sont baptisés et ceux qui ne le sont pas. Ces derniers se retrouveront entre eux pour préparer leur baptême. « Au caté, nous étions neuf ou dix, mais pour le baptême, on faisait deux groupes de trois, chaque groupe avec un adulte. »
Cette expérience communautaire de la découverte de la foi est très importante pour l'Eglise. Le groupe a aussi l'avantage d'éviter le vedettariat. Préparés ensemble, les enfants recevront ensemble les sacrements de l'initiation. Le jour où ils deviennent membres de l'Eglise par le baptême, il est normal qu'ils reçoivent l'Eucharistie, à condition qu'ils le désirent. Ce n'était pas le cas de cette petite fille, qui trouvait que le même jour, c'était trop pour elle ! Les enfants sont parfois confirmés ce jour-là. Mais cette décision dépend du choix pastoral du diocèse.
Et après ? L'avenir n'est certes pas bouché pour les enfants qui n'ont pas été baptisés en primaire. D'autres, plus nombreux encore, constate Jeanine Cox, le sont en sixième et cinquième. D'autres encore au cours de l'adolescence, lorsqu'ils seront dans les dernières années du Collège ou au Lycée.
Ces baptêmes tardifs toutefois ne compensent pas la diminution du nombre des baptêmes des petits enfants. Mais ils montrent bien que l'accès à la foi chrétienne est toujours possible, toujours ouvert.
Pour les enfants qui ont reçu le baptême à ces âges, l'enjeu de l'après-baptême est le même que pour tout enfant catéchisé. La question « que fait-on une fois que le sacrement est donné ? » rejoint celle-ci : « Que fait-on au lendemain de la profession de foi ? »
A tous, il est vital de proposer un mouvement d'Eglise, comme l'A.C.E., le M.E.J., le scoutisme, pour qu'ils aient un réel soutien dans leur vie chrétienne.
Vers le baptême
L'Eglise propose aux enfants en chemin vers le baptême un parcours catéchuménal en quatre étapes. Chacune de ces étapes est marquée par une célébration liturgique.
• 1ère étape Accueil par l'Eglise de la demande de baptême
Il est indispensable que les parents de l'enfant aient accepté qu'il participe à un groupe de catéchèse. C'est en ce groupe qu'il préparera son baptême.
La célébration exprime la joie de cet accueil et l'engagement des participants à accompagner l'enfant.
• 2ème étape L'entrée en catéchuménat
Lorsque l'enfant a commencé à découvrir la personne de Jésus et qu'il exprime le désir de mieux le connaître et l'aimer, l'Eglise l'accueille dans son peuple. Il en devient solidaire.
La célébration comporte deux temps : l'enfant est d'abord marqué du signe de la croix. Puis vient la lecture d'un ou plusieurs textes de l'Ancien et du Nouveau Testament. Le prêtre fait une homélie suivie de l'engagement du futur baptisé et de l'assemblée.
• 3ème étape Rite pénitentiel
Cette étape correspond au moment où l'enfant prend conscience que sa réponse à l'amour de Dieu est moins grande que cet amour, qu'elle connaît des limites, des ratés.
La célébration exprime cette reconnaissance d'être aimé de Dieu, mais aussi des moments de découragement et de résistance à répondre à cet amour. Elle se termine par la proclamation que l'amour de Dieu est plus fort que le péché, puis par l'imposition des mains ou l'onction d'huile.
• 4ème étape Célébration des sacrements de l'initiation
L'enfant va recevoir le baptême. Aussitôt après il participe à la liturgie eucharistique et fait sa première communion. C'est l'étape décisive : l'enfant fait dorénavant et définitivement partie du peuple de Dieu, de l'Eglise.
La célébration est marquée par la profession de foi de l'assemblée, en prélude à celle des futurs baptisés. Puis vient le rite de l'eau, signe de purification bien sûr, mais surtout de participation à la mort et à la résurrection de Jésus. Viennent ensuite des rites complémentaires : l'onction post-baptismale, la remise du vêtement blanc, la remise du cierge allumé ou cierge pascal.
Bibliographie
Pour les adultes
Rituel du baptême des enfants en âge de scolarité, C.n.p.l.-Chalet-Tardy. Le cheminement proposé par l'Eglise de France aux enfants qui se préparent au baptême. Liturgie des quatre étapes de sa célébration. C'est le livre de référence.
Le baptême entre sept et douze ans. Un dossier du magazine des catéchistes Points de repères, Numéro 152, Bayard Presse. Ce dossier répond aussi aux questions que peuvent se poser parents, grand-parents, parrains et marraines.
Pour les enfants
Le Baptême, Tu veux devenir chrétien, par Agnès Auschitzka. Centurion.
Un petit livre complet, agrémenté de belles illustrations.
Quelques chiffres
En 1994, 42,2 % des enfants étaient catéchisés en France, soit 1 032 000 enfants. Parmi ceux-ci, 42 674 n'étaient pas baptisés, soit :
– en CE2, 4,8 % des enfants vont au catéchisme et ne sont pas baptisés
– en CM1, 4,3 % des enfants vont au catéchisme et ne sont pas baptisés
– en CM2, 3,2 % des enfants vont au catéchisme et ne sont pas baptisés.
Notons que ce pourcentage est de 5,8 % pour les enfants handicapés.
Parmi ces enfants catéchisés non baptisés, certains recevront le baptême au terme de deux ou trois années de préparation. Leur nombre n'est pas connu statistiquement avec précision. La seule chose certaine, c'est qu'ils sont plus nombreux chaque année.