Afrique : Réconciliation et Développement

15 Avril 2009 | par

La visite du Pape au Cameroun et en Angola, du 17 au 23 mars dernier, a été occultée dans les médias occidentaux par la polémique autour du préservatif. Pourtant Benoît XVI a adressé à l’Afrique des paroles essentielles pour l’avenir du « continent de l’Espérance ». Deux thèmes principaux sous-tendaient ses interventions : la réconciliation et le développement.



C’est d’abord pour leur remettre le document de travail préparatoire au prochain synode pour l’Afrique (qui aura lieu en octobre à Rome) que Benoît XVI avait donné rendez vous aux évêques de tout le continent, au Cameroun. Une session justement consacrée à « L’Eglise, au service de la réconciliation, de la justice et de la paix ».



Laissez-vous réconcilier


« Laissez-vous réconcilier, a-t-il lan-cé, aucune différence ethnique ou culturelle, de race, de sexe ou de religion ne doit devenir entre vous un motif d’affrontement ». Avec la conviction que tous les hommes sont « fils de l’unique Dieu (…), a confié Benoît XVI, il sera alors possible de construire une Afrique plus juste et pacifique, à la hauteur des attentes légitimes de tous ses fils ».

Rappelant que l’Afrique n’avait « pas été épargnée » et qu’elle était « encore le triste théâtre de graves tragédies qui appellent à une vraie réconciliation entre les peuples, les ethnies et les hommes », le souverain pontife a affirmé que « l’Eglise devait être une communauté de personnes réconciliées avec Dieu et entre elles ». Ainsi, a-t-il poursuivi, elle pourra « annoncer la Bonne Nouvelle de la réconciliation à la société actuelle, qui connaît malheureusement en de nombreux lieux des conflits, des violences, des guerres, et de la haine ».

Ce thème de la réconciliation allait trouver un nouvel écho lors de la deuxième étape de son voyage, en Angola. Dans ce pays ravagé par près de trente ans d’une impitoyable guerre civile, le Pape a salué les efforts entrepris depuis 2002 pour rétablir la paix, et il a supplié les Angolais : « Je vous en prie, ne vous laissez pas prendre par la loi du plus fort ! »



Acteurs du développement 

Depuis l’Angola, Benoît XVI a exhorté la communauté internationale à ne pas élaborer des plans et des solutions pour l’Afrique sans y associer les Africains eux-mêmes.

Le Pape a indiqué que « le développement économique et social en Afrique requiert la coordination des actions gouvernementales nationales avec les initiatives régionales et avec les décisions internationales. Une telle coordination, suppose que les nations africaines ne soient pas seulement considérées comme les destinataires des plans et des solutions élaborées par d’autres », a-t-il expliqué. « Les Africains eux-mêmes(…) doivent être les premiers acteurs de leur développement ».

Après avoir salué plusieurs initiatives comme le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) ou le Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement dans la région des Grands Lacs, Benoît XVI a présenté comme une urgence « l’entière et juste réalisation des engagements pour le développement indiqués par le Doha round, ainsi que la promesse des pays développés, faite à plusieurs reprises, de consacrer 0,7% de leur PIB (Produit intérieur brut) à l’aide officielle au développement ».

Au terme de son voyage apostolique en Afrique, le 23 mars, Benoît XVI a lancé « un appel final » aux hommes politiques en faveur « des populations les plus démunies ».

« Notre cœur ne peut être tranquille tant que des frères souffrent à cause du manque de nourriture, de travail, de maison ou d’autres biens primordiaux », a martelé le Pape. « Pour arriver à apporter une réponse concrète à nos frères humains, a-t-il poursuivi, le premier défi à relever est celui de la solidarité : solidarité entre les générations, solidarité entre les Nations et entre les Continents, qui engendre un partage toujours plus équitable des ressources de la terre entre tous les hommes ».





Préservatif : ce que le Pape a vraiment dit



« Je pense que la réalité la plus efficace, la plus présente sur le front de la lutte conte le Sida est précisément l’Eglise catholique, avec ses mouvements, avec ses différentes réalités. Je pense à la Communauté de Sant’Egidio qui accomplit tant, de manière visible et aussi invisible, pour la lutte contre le Sida, aux Camilliens, et tant d’autres, à toutes les Sœurs qui sont au service des malades.

Je dirais qu’on ne peut pas surmonter ce problème du Sida uniquement avec de l’argent, pourtant nécessaire. Si on n’y met pas l’âme, si les Africains n’aident pas [en engageant leur responsabilité personnelle], on ne peut pas résoudre ce fléau par la distribution de préservatifs : au contraire, ils augmentent le problème.

La solution ne peut se trouver que dans un double engagement : le premier, une humanisation de la sexualité, c’est-à-dire un renouveau spirituel et humain qui apporte avec soi une nouvelle manière de se comporter l’un envers l’autre, et le deuxième, une véritable amitié également et surtout pour les personnes qui souffrent, la disponibilité, même au prix de sacrifices, de renoncements personnels, à être proches de ceux qui souffrent. Tels sont les facteurs qui aident et qui conduisent à des progrès visibles.

Je dirais donc cette double force de renouveler l’homme intérieurement, de donner une force spirituelle et humaine pour un juste comportement à l’égard de son propre corps et de celui de l’autre, et cette capacité de souffrir avec ceux qui souffrent, de rester présents dans les situations d’épreuve. Il me semble que c’est la juste réponse, et c’est ce que fait l’Eglise, offrant ainsi une contribution très grande et importante. Nous remercions tous ceux qui le font.»




La joie de l’Afrique

Deux aspects surtout m’ont impressionné, tous deux très importants. Le premier est la joie visible sur les visages des personnes, la joie de se sentir membre de l’unique famille de Dieu, et je remercie le Seigneur d’avoir pu partager avec les foules de nos frères et sœurs, des moments de fête simple, dans l’unité et la foi. Le deuxième aspect est justement le fort sens du sacré que l’on respirait dans les célébrations liturgiques, une caractéristique commune à tous les peuples d’Afrique et qui s’est manifestée en quelque sorte à chaque moment de mon séjour parmi ces chères populations.

Cette visite m’a permis de voir et de mieux comprendre la réalité de l’Eglise en Afrique dans la diversité de ses expériences et des défis qu’elle affronte en ce moment.



Benoît XVI, Angelus du 29 mars 2009.




 

Updated on 06 Octobre 2016