2e Prix International Saint-Antoine
Le lever du rideau donne le ton : Frère Antoine affronte Ezzelino da Romano, seigneur de Vérone, pour obtenir la libération de prisonniers, au nom de la justice:
«Aimez la justice, lui dit-il, vous qui gouvernez.
- La justice ? répond le tyran, elle doit être crainte, non aimée. Elle doit être maintenue, avec terreur, si nécessaire ! C’est moi qui ai ce pouvoir...
- Mais les âmes des justes, elles, sont dans les mains de Dieu, insiste Antoine avec calme et assurance». Les deux se quittent, comme en témoigne l’histoire, sur un constat d’échec, mais la force d’âme d’Antoine nous pousse encore aujourd’hui, à chercher la justice.
Le Prix télévision. Tout au long de la soirée, interviews et témoignages soulignent cette exigence.
«Nous sommes confrontés chaque jour à la souffrance, dit Daniela Poggi, animatrice de télévision dans un programme de recherches de personnes. Chaque semaine, nous assistons à la disparition dramatique de nombreux jeunes entre 20 et 35 ans.»
Yaël Abecassis, actrice israélienne, interprète du personnage de Marie dans le film de Goffredo Lombardo, Marie, Fille de son Fils et lauréate du Prix télévision avoue: «Pour interpréter ce rôle, j’ai essayé de revivre en moi ses sentiments de sérénité et d’espérance, dans l’attente de la Résurrection.
- Comment vivez-vous le drame d’Israël en ce moment?
- La paix, je la cherche d’abord dans mon coeur, confie-t-elle, en vivant l’amour, en dehors des conflits politiques.»
Par ailleurs, son interprétation est mesurée. Elle sait être authentique, quand elle aime et quand elle souffre, et communique son émotion aux spectateurs... «C’est un film qui a comblé mon coeur», affirme Goffredo Lombardo, le producteur.
Le Prix cinéma a récompensé le cinéaste portugais, Manoel de Oliveira, pour son film Palavra e Utopia. Agé de 92 ans, grand maître du petit écran, il produit encore actuellement un long métrage chaque année. Il est attaché à saint Antoine, son compatriote, par dévotion et se dit heureux de fêter ses 60 ans de mariage avec son épouse Isabelle, dans la ville d’Antoine...
Pour la justice...
Les deux autres prix, Solidarité et témoignage ont été attribués respectivement à don Luigi Ciotti, fondateur du groupe Abele, et à Sœur Helen Prejean, symbole de la lutte contre la peine de mort aux Etats-Unis.
«Les mots solidarité et volontariat devraient disparaître, a déclaré avec force don Luigi Ciotti. La justice est l’affaire de tous. Tous, nous devons travailler pour que les droits de chacun soient respectés ; et lutter contre les pouvoirs maffieux qui causent tant de dommages à nos jeunes et créent trop d’exclusions».
A ce Prix Solidarité avaient également concouru cinq autres groupes présentés dans le Messager entre février et juillet-août, dont, pour la France, le mouvement Foi et Lumière, créé par Marie-Hélène Matthieu et Jean Vanier. Le Prix Saint-Antoine a également récompensé des lecteurs français: parmi ceux qui avaient voté pour les groupes de solidarité, un couple de Ille-et-Vilaine avait été tiré au sort pour effectuer un voyage à Padoue. Malheureusement, ce voyage n’a pu avoir lieu pour des raisons de santé. A la prochaine fois, donc !
...et contre la peine de mort
Sœur Helen Prejean était accompagnée de Jane Southard Barnabei, la mère de Derek Rocco Barnabei, exécuté le 14 septembre dernier. Une rencontre exceptionnelle qui a délivré des témoignages poignants à un public entièrement gagné à la cause.
«Mon fils, a raconté Jane Barnabei, aurait pu éviter la peine de mort s’il s’était déclaré coupable. Il ne l’a pas fait, parce qu’il était innocent... On l’a tué parce qu’il était contre la peine de mort... Mais Dieu seul a le droit de disposer de la vie.»
Sister Prejean, elle, a raconté son combat de tous les jours. Elle a raconté son expérience dans le livre Dead Man Walking, le Mort qui marche, porté au cinéma et qui a valu un Oscar à son interprète, Susan Sarandon, en 1995. Sa seule présence ici est un témoignage d’exception ; le public le sent et les questions fusent:
«Que dites-vous à un condamné qui va mourir ?
- Ce que je lui dirais durant toute sa vie : la vie vaut quelque chose... Christ est proche de toi.
- La position de l’Eglise catholique est-elle claire?
- Oui, comme sur toutes les autres questions importantes. Evêques et pape ont parlé clairement : il n’y a plus de raisons de pratiquer la peine de mort ; pour toute vie, coupable et non coupable. Il y a actuellement dans le monde 1800 exécutions par an. 120 pays l’ont supprimé, 80 la pratiquent encore. Nous avons peut-être perdu une bataille, mais le combat continue. La mort de Derek Rocco Barnabei a provoqué aux Etats-Unis une prise de conscience dont nous commençons à voir les fruits: ces derniers mois, 88 vies ont été sauvées.»
Parallèlement, la Communauté Sant’Egidio a lancé, il y a deux ans, une campagne qui a recueilli, à ce jour, 2 millions de signatures. Elles seront présentées en septembre prochain au siège de l’ONU, à New York.
Au terme du spectacle, un spectateur pouvait déclarer: «Après tant de réflexions qui nous vont droit au cœur, il ne sera plus possible de dormir de sommeils tranquilles.»