Comment discerner sa vocation ?
Clarification, tri, libération. Si ces termes peuvent paraître étonnants de prime abord, ils prouvent que la démarche de discernement est mise en œuvre ! Discerner, c’est mettre à la lumière ce qui n’est pas encore visible, c’est écouter l’Esprit Saint et le laisser nous révéler la volonté de Dieu. Dieu ne nous appelle pas à quelque chose que nous ne pourrions faire. Son appel inclut la possibilité d’une réponse. On ne prend pas tel ou tel chemin par mépris des autres chemins, mais car Dieu nous appelle sur celui-là et non tel autre.
Le mot français « vocation » vient du latin vocare qui signifie « appeler ». Toute vocation est un appel et implique deux partenaires : celui qui appelle et celui qui est appelé. L’appel est la rencontre de Jésus Christ dans notre vie. Le discernement spirituel permet d’aboutir à une certitude qui va au-delà des raisonnements, des preuves et des arguments ; on sait que le choix fait est le bon. Mais discerner s’apprend. Pour saint Ignace de Loyola, le discernement est l’incarnation de l’amour.
Discerner s’apprend
Un choix à faire ou un projet à bâtir suscitent en nous des résistances et des aspirations qui nécessitent naturellement un tri. Nos choix ne doivent pas être le fruit de passions ou d’attachements désordonnés qui les abîmeraient, mais le fruit d’un processus qui demande du temps et une vraie liberté intérieure. Il faut accepter de choisir, de décider et par là de renoncer à ce que l’on ne choisit pas. Chercher sa vocation, ce n’est pas déchiffrer ce qui serait déjà écrit. Nous sommes appelés à faire fructifier les talents que nous avons reçus et les mettre au service des autres. La vocation n’est pas une énigme à percer, c’est une histoire qui porte du fruit. Se poser la question de la vocation implique d’identifier des désirs qui durent et illuminent notre conscience et tout notre être. Selon le pape François, « le discernement n’est pas une autoanalyse intimiste, une introspection égoïste, mais une véritable sortie de nous-mêmes ». Un bon discernement aboutit nécessairement à la joie et nous entraîne dans une proximité plus grande avec le Christ et à une vie plus féconde.
La joie, fondement de tout
La joie, l’humilité, la sérénité, l’apaisement, le courage, l’élan du cœur désintéressé, la charité et la paix sont les signes que le Saint-Esprit agit clairement dans une âme qui recherche sa voie de manière droite. La spiritualité ignacienne invite chacun à découvrir la volonté de Dieu à travers ce qui lui arrive. La joie et la consolation en sont « la boussole », selon un jésuite. C’est dans l’expérience de la joie reçue d’un Autre, joie qui vient de Dieu, qu’une personne peut éprouver la justesse et la vérité des choix posés. Et dans l’expérience de leur contraire, on comprend leur fausseté. Dieu se communique par la joie et non dans l’angoisse, la peur, l’agitation, l’inertie ou le repli.
Le temps et sa fécondité
Le discernement d’une vocation ne se fait habituellement pas de manière intempestive et fulgurante. Discerner l’appel de Dieu nécessite du temps, de la patience, du mûrissement, un compagnonnage. Il se reçoit dans l’humilité à travers des intuitions et des confirmations. Prendre son temps, en parler à une personne de bon conseil, permettre à l’Église d’authentifier l’appel et prier permettent au fruit de mûrir et d’être cueilli ! C’est alors que la décision peut être prise dans la paix.
Le Seigneur nous éclaire dans la mesure où nous lui faisons confiance, chaque jour, à chaque étape. Le temps de recherche, sans précipitation, est un temps précieux, riche d’expérience. De toute évidence, le temps n’agit pas tout seul. On a besoin d’être conduit, accompagné avec une personne qui écoute. Qui s’aventurerait en haute montagne sans guide ? Selon le document final de la réunion pré-Synodale sur les jeunes, « passer du temps en silence, dans l’introspection et la prière, ainsi que la lecture des Écritures et l’approfondissement de la connaissance de soi sont des opportunités que très peu de jeunes saisissent ».
Se décider
Il y a un temps pour discerner et un moment pour se décider. Personne ne pourra décider à notre place. Prendre une décision permet de sortir de l’impasse du non-choix et de l’immobilisme. Faire mémoire, relire son histoire avec un regard de foi, devient un acte fécond suite à ces questions qui appellent une réponse et une décision : comment et quand la vie s’est-elle déployée en moi ? Quels sont les évènements vécus, les relations heureuses ou difficiles, mes expériences de foi, mes désirs ? Ai-je été touché par tel fait de la vie d’un saint ? Quand la vie a-t-elle produit une œuvre de création, d’élan ou au contraire produisant froideur, immobilité et tristesse ? Quand et avec qui ai-je connu la joie ? Un père jésuite aimait confier : « l’amour sans discernement est un rêve qui ne passe plus par les chemins des hommes et s’égare dans un infini sans contenu réel. Le discernement sans l’amour est une recherche desséchante qui, incapable de saisir la finalité de l’action humaine, s’enlise dans l’activisme. »
Lorsque le discernement est fini et la décision prise, l’homme ne doit pas oublier que toute vocation annonce une lutte, des tentations et des obstacles ; l’expérience et la Bible en témoignent. Il ne faut pas en avoir peur et ne pas remettre en question la décision car elle devance un avenir qui reste à construire. Chaque vocation est complémentaire car elle est pour les autres et pour l’Église.